L’offensive engagée par l’Ukraine avance « régulièrement et délibérément »

Impossible d’aborder la question de la guerre en Ukraine sans s’intéresser au front, alors qu’une opération cruciale se déroule depuis début juin, celle de la libération du pays par ses forces armées. 

Cette offensive progresse au sens qu’elle est menée avec une énergie et une intensité incroyable, tandis que nous ne percevons à ce stade que l’érosion d’une digue russe qui peut paraître aussi rigide que la folie destructrice de Poutine. 

Pourtant, des généraux russes de premier rang reconnaissent les pertes subies sous les assauts ukrainiens et alertent de leur incapacité à soutenir dans la durée une telle offensive. Ils sont aussitôt écartés et réduits au silence, comme une ultime et vaine protection d’un plan voué à l’échec. 

Lire aussi : Face à son échec en Ukraine, la Russie de Poutine se fissure… et son armée désormais nous le dit


Comment le chef d’état-major américain décrit l’offensive de l’Ukraine

Après avoir commenté les déclarations du général russe Yvan Popov, je vous propose de lire attentivement le général américain Mark Milley, chef d’état-major des armées des Etats-Unis. 

Le 18 juillet, il participait à une réunion importante du « groupe de contact », l’instance de coordination de la cinquantaine de pays qui soutiennent militairement l’Ukraine dans sa résistance à l’invasion déclenchée par Poutine en février 2022. 

Le général Mark Milley n’est pas un politicien, ni un porte-parole qui doit faire passer à tout prix des « éléments de langage » soigneusement choisis pour habiller la réalité et rassurer des opinions publiques inquiètes de l’opacité qui règne sur le champ de bataille. Non, Milley est un officier général sévère et rigoureux qui analyse les opérations en professionnel de la guerre, et ses propos sont clairs à condition de savoir les lire dans notre société qui a perdu pour l’essentiel sa culture militaire. 

« […] Alors que l’Ukraine poursuit sa contre-offensive, elle nous rappelle que la vraie guerre n’est pas une guerre sur le papier. La vraie guerre est imprévisible, elle est remplie de peur, de brouillard et de friction. La vraie guerre est brutale. Le creuset des combats a des coûts énormes, en termes de tués, de blessés, de personnes déplacées et de réfugiés, et pourtant, malgré les coûts énormes, les Ukrainiens avancent régulièrement et délibérément, soutenant des batailles brutales et sanglantes pour récupérer leur patrie.

Comme nous l’avons dit publiquement il y a des semaines, cette offensive sera lente, elle sera difficile et elle aura un coût élevé. Cette bataille se poursuit alors que les Ukrainiens se battent à travers des champs de mines denses et des obstacles, tandis qu’une solide force de réserve ukrainienne attend d’être engagée au moment et au lieu optimum au choix des Ukrainiens.

L’aide du groupe de contact ukrainien à l’Ukraine va au-delà des simples mots ou gestes symboliques. Nous nous engageons à les aider là où cela compte le plus. Collectivement, la coalition a formé 17 brigades de combat pour cette offensive et plus de 63 000 soldats. […] »

Groupe de contact, réunion du 18 juillet, déclaration du général Mark Milley

J’ai souligné en gras quelques passages, l’intégralité des propos se trouvant (en anglais) sous la référence au-dessus. 

la vraie guerre n’est pas une guerre sur le papier

Beaucoup de commentateurs et la plupart des décideurs n’ont pas d’expérience militaire et encore moins de la guerre. Et cette guerre en Ukraine, probablement parce qu’elle met par terre cette dangereuse conviction que nous n’étions plus concernés par ces sujets militaires, ne doit pas nous faire oublier que nos connaissances sur le sujet restent lacunaires. 

La « vraie guerre » est un phénomène particulièrement brutal, d’une violence et d’une cruauté inimaginable : il est difficile pour ceux qui l’ont vécue de soutenir les commentaires basés sur des raisonnements de « papier », des tableaux de matériels guerriers, ou des comparaisons de tués et de blessés, pire encore des vitesses de progression quand la moindre avancée se paie en sang versé. 

Le général Milley nous rappelle simplement que la guerre est une longue suite de tragédies et de saloperies, que sa réalité est d’une rare complexité. 

les Ukrainiens avancent régulièrement et délibérément

Le général Miley est remarquablement informé de la réalité des opérations en Ukraine, peut-être mieux encore que son homologue ukrainien parce qu’il a une forme de distance avec les événements que ce dernier ne peut garder.

Quant à son homologue russe, le général Guerassimov, il apparaît que sa longévité sur son poste tient plus à sa totale loyauté au président Poutine qu’à sa clairvoyance sur une opération militaire spéciale qu’il lui est interdit de critiquer.

Le général Guerassimov s’entretenant avec le président russe Vladimir Poutine

Que les forces ukrainiennes avancent « régulièrement et délibérément » nous indique simplement que leur offensive se déroule et qu’il est trop tôt pour en tirer des conclusions. En effet, ces opérations n’ont de sens que si elles arrivent à percer cette digue érigée par les troupes de Poutine, afin de les submerger ensuite.

Si les forces ukrainiennes percent, ce qu’elles tentent de faire depuis plus de 6 semaines maintenant, elles pourront compter sur un phénomène de débâcle que les troupes de Poutine redoutent tant leur moral, leur approvisionnement, leur formation et leur commandement sont délabrés. La clef de cette offensive est bien d’arriver à percer cette digue.

Lire aussi : le front en Ukraine ressemble à une immense digue menée au bord de l’implosion


cette offensive sera lente, elle sera difficile et elle aura un coût élevé

La stratégie de l’offensive ukrainienne n’a jamais été de mener une opération éclair, une Blitzkrieg qui nous aurait beaucoup plu avant l’été mais qui aurait nécessité en premier lieu de s’appuyer sur un effet de surprise. Bien au contraire, les armées russes ont eu des mois pour se préparer à contrer cette offensive, elles ont eu du temps et des moyens pour ériger cette digue, gigantesque par sa longueur, ce qui constitue aussi sa plus grande faiblesse. 

Pendant que feu Prigojine lançait ses miliciens à l’assaut de Bakhmut pendant des mois – avec un taux de perte de 80% –, l’armée russe minait, creusait, bunkerisait autant qu’elle le pouvait une ligne de front sur laquelle elle n’avait plus le droit de reculer après l’échec de Kherson, d’où elle avait dû se replier en frôlant la catastrophe. 

Lire aussi : 11 novembre 2022, libération de Kherson par les Ukrainiens 

L’offensive ukrainienne a bien été conçue pour s’attaquer à un tel dispositif et elle n’a jamais eu vocation à être rapide, facile et peu coûteuse. Après 6 semaines de combat d’une grande intensité, les Ukrainiens ne sont donc pas en difficulté, ils se battent avec toute leur énergie et disposent des moyens de continuer ce combat crucial pour leur avenir, j’y reviendrai. 

Rappelons-nous aussi qu’avec des moyens gigantesques, les alliés avaient mis plus de deux mois en 1944 pour percer en Normandie face aux armées d’Hitler. Huit décennies plus tôt – et c’est la référence du général Milley –, les forces alliées avaient débarqué début juin et percé seulement aux premiers jours d’août…

une solide force de réserve ukrainienne attend d’être engagée au moment et au lieu optimum 

Le chef d’état-major américain confirme enfin que les alliés de l’Ukraine ont préparé plus de 60,000 combattants, hommes et femmes, pour cette offensive. A ce stade, moins du tiers de ces forces ont été engagées dans l’opération : soit parce que les Ukrainiens espèrent percer dans le Sud, la région de Zaporijia en particulier où ils font porter actuellement l’essentiel de leurs efforts, entre 10 et 20 attaques par jour ;

Carte du front au 17 juillet 2023, les flèches en bleu indiquent les principales attaques des forces ukrainiennes © Le Monde 

soit parce qu’ils visent à affaiblir ce dispositif russe pour l’attaquer plus durement encore dans une région que les troupes de Poutine auraient imprudemment fini par dégarnir, plus au Sud-Ouest dans la région de Kherson ou plus au Nord sur la ligne de front. 

Ce que nous dit le général Mark Milley est donc que l’offensive ukrainienne est en cours, et qu’il faut patienter pour connaître son issue : une issue qui ne se jouera pas dans les heures à suivre, mais dans les semaines à venir. 

Lire aussi : L’opération de libération de l’Ukraine n’est encore ni un échec, ni un succès… puisqu’elle est en cours !


Une offensive « régulière » des Ukrainiens et une contre-offensive sans moyens des Russes

Ce qui est établi à ce stade de l’opération est que les Ukrainiens disposent encore de solides réserves quand l’armée russe aurait utilisé plus de la moitié des siennes. Dans ce contexte, il faut remarquer cette contre-offensive russe lancée au Nord du front, comme indiquée en rouge sur la carte précédente, probablement pour desserrer l’étau sur leur digue plus au Sud. 

Les Ukrainiens ont été informés suffisamment tôt pour pouvoir leur barrer la route, tandis que l’armee russe n’a pas rassemblé de moyens suffisants pour « poursuivre » cette offensive. Des commentateurs imprudents ont relayé des informations erronées, affirmant que plus de 100,000 soldats russes étaient engagés dans cette contre-offensive : ce serait une armée gigantesque au regard des 60,000 combattants préparés pour l’offensive ukrainienne, mais ces chiffres peuvent être divisés par 10 pour s’approcher de la réalité. 
La guerre de l’information nécessite de faire preuve d’un peu de lucidité pour ne pas se faire manipuler…

Autrement dit, les troupes de Poutine n’ont pas les moyens de reprendre une réelle offensive de conquête en Ukraine, et leur contre-attaque constitue clairement une manœuvre de diversion, indiquant que la pression sur le front sud ne leur est pas soutenable dans la durée. 

Il est cependant étonnant que les armées russes aient préféré consommer une partie de leurs réserves pour cette contre-offensive, ainsi que pour renforcer Bakhmut que les Ukrainiens affichent volontiers vouloir reprendre, sans que ce soit forcément une réalité à ce stade des opérations. 

Lire aussi : l’étrange destinée de Bakhmut 

En mobilisant ces unités au Nord du front, les armées russes gagnent un peu de temps, mais ces opérations coûteuses en soldats et en équipements leur font perdre des forces et affaiblissent encore leur capacité de résistance pour tenir sur leur « digue » dans les semaines à venir…


Deuxième attaque du pont Poutine en Crimée, avec des effets limités 

Le pont de Kertch, appelé aussi pont « Poutine » puisque le maître du Kremlin en est le promoteur, a été frappé pour la deuxième fois par les Ukrainiens. 

Ce pont, qui relie la Crimée à la Russie, remplit un triple rôle, une forme de cordon ombilical d’abord qui assure le lien politique de la Russie avec un territoire que cette dernière a annexé par la force et que Poutine voulait ancrer dans une Grande Russie, synthèse effarante de l’union soviétique et de l’empire des Tsars. 

Ce pont joue aussi un rôle crucial pour approvisionner la Crimée depuis la Russie, et en particulier l’armée russe qui est en difficulté dans la région de Zaporijia, sur laquelle les Ukrainiens concentrent leur offensive actuelle. 

Cette attaque du pont Poutine relève de la récidive puisque c’est une réplique quasi identique de celle menée en octobre dernier par les Ukrainiens, ridiculisant au passage le dispositif hyper-sécurisé de protection de ce symbole du pouvoir poutinien. 

Lire aussi : l’attaque du pont « Poutine » en Crimée, destructions et illusions

Au lieu d’un camion chargé d’explosifs, il est très probable que les Ukrainiens aient utilisé cette fois un ou plusieurs drones navals qui ont déjoué les défenses russes. Outre l’effet symbolique, l’impact sur la logistique du front militaire est important, mais limité par le fait que seule une travée routière sur les deux que compte le pont a été gravement endommagée. Il semble que la voie ferrée soit intacte et que la deuxième travée routière puisse supporter la reprise d’un trafic, même limité. 

Cela correspond donc à une diminution de l’ordre du 1/3 du flux logistique de cet axe vital pour le front Sud. Cette attaque audacieuse constitue un affaiblissement supplémentaire des approvisionnements militaires russes, au moment où les Ukrainiens frappent durement les principaux dépôts logistiques et centres névralgiques russes avec notamment des missiles Storm Shadow/Scalp fournis respectivement par la Grande-Bretagne puis la France. 

Il est à noter que ces armements n’ont pas été utilisés pour attaquer le pont de Kertch, alors qu’ils sont difficilement interceptables par la défense anti-aérienne russe du fait de la furtivité de leur profil de vol. Cependant, le pont de Kertch est en limite de leur portée, à 300 km de la ligne de front, et il est probable que les fournisseurs de ces armements précieux n’aient pas souhaité qu’une cible aussi symbolique que le pont « Poutine » soit visée par ces missiles. 

D’un point de vue militaire, c’est un peu dommage car leur pouvoir de destruction aurait été beaucoup plus efficace que le drone naval, le pont Poutine ne se serait pas contenté de vaciller, il aurait sans doute été renversé…


Le chantage injustifiable de Poutine sur la sécurité alimentaire mondiale

Enfin, je ne peux conclure cet article sans faire le lien entre la situation sur le front et l’arrêt brutal par Poutine de l’accord permettant l’exportation de millions de tonnes de céréales en provenance d’Ukraine.

Non seulement Poutine se retire brutalement de cet accord, mais il fait attaquer (par des missiles) les infrastructures portuaires nécessaires à ces exportations : un chantage injustifiable sur la sécurité alimentaire, comme l’a souligné la ministre française des affaires étrangères. 

Le maître du Kremlin ne peut ignorer la situation difficile de ses propres armées face à l’offensive ukrainienne : espère-t-il négocier ainsi un arrêt des combats pour figer ses conquêtes et empêcher les Ukrainiens de mener plus avant leur offensive ?

De fait, Poutine sait que le front militaire s’est inversé et qu’il lui reste peu de temps avant d’être renversé.




Lire le remarquable récit de Florence Aubenas dans Le Monde : En Ukraine, dans les hôpitaux secrets de l’arrière-front où l’horreur des blessures raconte la guerre



Pour approfondir, lire : La part d’ombre, le risque oublié de la guerre, par Stéphane Audoin-Rouzeau


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22 commentaires sur “L’offensive engagée par l’Ukraine avance « régulièrement et délibérément »

  1. Merci pour cet article. Je nous trouve, Européens de l’Ouest et Français, hélas très faibles. D’autres diront très « prenables » d’un point de vue géostratégique. En effet, je découvre aujourd’hui comme citoyen lambda, tout comme l’ensemble de l’opinion publique, que la Russie et d’autres nations (parfois anciens empires, parfois désirant être à nouveau des empires) nous menacent directement – et ouvertement – depuis des années, et que rien ou presque n’a été fait jusqu’il y a peu.

    A l’heure où certaines armées disposent de centaines de milliers d’hommes, parfois de millions, et de dizaine de milliers d’équipements air – mer – espace – terre – cyber – et autres, nous autres européens et français n’avons selon les domaines, que très peu de choses à déployer, et parfois rien. Au contraire, je dirais même que cela s’accompagne par des fonctionnements internes des nations inefficaces, une union de pays désuète (l’UE, qu’à l’origine je chéris tant) et une diplomatie chaotique, et qui est parfois même naturellement ou logiquement peureuse. Rien que du point de vue matériel français, ce qui est le plus simple à estimer de mon éloigné point-de-vue, il suffit de voir notre si faible quantité de chars lourds Leclerc, d’avions de chasse Rafale, d’hélicoptères d’attaque Tigre, de lance-roquettes multiples LRU, d’obusier Caesar et de système anti-air Crotale ou Mamba pour s’en rendre compte. Rajoutons l’absence totale de drones militaires digne de ce nom (sur les terres de Dassault et Airbus… ce qui est un comble), le trou capacitaire entre Ariane 5 et Ariane 6, la rareté de nos moyens cyber et l’inexistence de satellites d’attaque. Sans parler du très faible volume d’hommes et de femmes, tout cela démontre que quoi qu’on en dise, nous sommes à poil. Peut-être ce qui est le plus révélateur : rien que pour toute l’UE (550 millions d’habitants, 2eme économie mondiale) nous avons qu’un seul et unique porte-avion, et encore il est français…

    On pourrait également s’attarder sur toutes ces lacunes qui nous pètent à la gueule sur le champ informationnel (propagande, fausses informations, manipulation des réseaux sociaux et d’internet, voire des plus grands médias « indépendants » en place), sur le plan économique (fortes dépendances financières, énergétiques et manufacturières) et sur l’aspect politique (corruption d’ancien ou actuels chefs d’état, promotion des partis extrémistes, mise en chaos de la démocratie, promotion d’alternatives dictatoriales).

    Si encore nous français étions les seuls en Europe à être dans cette situation, on pourrait comprendre que nous étions malheureusement les derniers de la classe, ou que nous avions faits tous seuls dans notre coin les mauvais choix. Hélas, j’ai l’impression que nos chers voisins – Allemagne, Espagne, Royaume-Uni, Pays-Bas et Italie – sont encore pires que nous.
    Comment nous autres, qui sommes libres, créatifs, éduqués, heureux, riches, critiques, démocrates, citoyens, intelligents, légaux et humanistes, avons pu en arriver là ?

    Par conséquent, face à cela, face à si peu d’opposition, face à si peu de courage ou tant de faiblesses de notre part, tous se sentent pousser des ailes, et souvent pour de tristes et morbides objectifs. Russie, Iran et Chine – ou leurs régimes/dirigeants – ne se cachent plus, quant à la Turquie, l’Inde et le Brésil, ils risquent quant à eux de passer du mauvais coté de l’humanité du fait de notre manque d’attractivité et notre défaut de puissance. Et peut être que d’autres forces, aujourd’hui encore volontairement dissimulées, se révèleront être aussi tout autant menaçantes et agressives, sinon plus. Je pense bien évidement à l’Arabie, les Philippines, l’Algérie, l’Egypte et l’Afrique du Sud par exemple… Peut-être mêmes les Etats-Unis un jour, que je n’espère jamais.

    Je me demande parfois, si les plans de la Russie avaient fonctionné ou les Ukrainiens n’avaient pas été si héroïques – avec une partie de nos matériels et de nos renseignements – où nous en serions aujourd’hui, qu’est-ce que nous serions devenus.

    Il ne faut donc pas s’étonner que l’on se fasse balader par les uns et par les autres, et que nous soyons directement menacés, voire précaires… Mieux vaut tard que jamais, mais il est grand temps que l’Europe et la France en son sein se réveillent.

    AC

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  2. cher Guillaume,

    je lis toujours avec beaucoup d’intérêt des articles si riches en analyse et précis.

    Il y a une question que je me pose et sur laquelle je n’a jamais vu d’écrits. Il y a-t-il dans les zones occupées par les Russes des « résistants » ukrainiens dans le même sens que nous en avions pendant la deuxième guerre mondiale ? Sont-ils organisés, armés et soutenus par le gouvernement ukrainien ? J’imagine que tels actes de résistance doivent être terriblement risqués et durement réprimés par les forces d’occupation russes. Il faut aussi certainement distinguer selon les régions. Mais ce qui me surprend toutefois, c’est le silence sur le sujet.

    bonnes vacances si tu en prends !

    amicalement,

    Vincent

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    1. Bonsoir Vincent et merci pour ton retour.
      Des groupes de partisans sont actifs en zone occupée par les Russes, certains sont même actifs en Russie, alors que beaucoup de Russes ont des liens forts avec des Ukrainiens et réciproquement, ce qui pose aussi un problème de sécurité intérieure en Ukraine…
      La guerre des partisans et des réseaux secrets est importante, surtout pour le renseignement et le ciblage…

      Amitiés
      Guillaume

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  3. L’actualité me semble poser la question de l’intervention de l’OTAN.

    L’Otan pourrait-il permettre, en s’impliquant physiquement, un couloir permettant l’acheminement de marchandises en mer noire ?

    De même, risque-y-il d’y avoir des provocations de Wagner a la frontière biélorusse et polonaise qui pourrait déboucher sur une entrée de l’OTAN dans le conflit ?

    Je pense également au risque d’explosion de la centrale de Zaporijja qui pourrait être un motif d’intervention.

    Cela pourrait enfin faire peser la balance, malgré les risques énormes.

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    1. Toutes ces éventualités constituent des risques d’escalade que l’OTAN et plus largement Léa cinquantaine de pays qui soutiennent l’Ukraine veulent éviter.
      Néanmoins, la centrale de Zaporijia ne présente pas une menace de type Tchernobyl et il ne faut pas accepter de chantage à ce sujet.
      Quant à Wagner, je crois surtout que cette milice n’existe quasiment plus…

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  4. Cette synthèse des récents événements qu’on a pu suivre sur LCI est intéressante.

    Mais j’observe que les émission de LCI sont de plus en plus radoteuses, répétant sans relâche au cours de la même soirée, voire des soirées successives des informations éparses et rares dues au silence imposé par les stratèges. D’une certaine manière j’admire les journaliste meneurs qui meublent les espaces d’antennes sans relâche, mais finalement quand on a regardé une demi-heure, on a vu toute la soirée.

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  5. Merci pour cette analyse, et d’adjoindre à chaque fois à la réalité du terrain celle des esprits, les aspects psychologiques, des combattants, des opinions publiques, les aspects politiques et géopolitiques.

    Oui, en écho à Guillot, merci Guillaume Ancel de vous engager comme vous le faites, d’avoir une parole, la vôtre. Très surpris aussi pour ma part de l’espèce d’évitement du sujet de la guerre en Ukraine chez la très grande majorité de mes proches, et des gens que je côtoie.

    Même s’il est vrai que je constate qu’un certain nombre d’analystes ont viré leur cuti dernièrement, je le dis sans ironie, et même avec satisfaction, trop encore s’imaginent pouvoir être neutres, au-dessus de la mêlée, sachants. Être engagé n’empêche pas d’être factuel. Il faut accepter pour une part non négligeable l’incertitude de la guerre. Et que nous y sommes engagés que nous le voulions ou non, nous sommes des acteurs, plus ou moins infinitésimaux dans notre impact, mais c’est cette somme qui participera à faire basculer la balance du bon côté ou pas.

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  6. Mais je ne vois pas un renversement de Poutine dans un avenir proche. Tant que la ligne défensive russe tient ; et le coup de Prigozhin a paradoxalement renforcé son lien avec la population (+8 pts dans le dernier sondage), lui a permis de nouer des liens directs avec les grands commandants des 4 zones de la NVO et de fiabiliser sa garde rapprochée. Il va d’ailleurs sûrement continuer à écarter ceux dont il n’est pas totalement sûr et en ayant intégré les SMP (les + à même de lui poser problème) à l’armée russe, il en a pris le contrôle.
    Donc au contraire de Shoïgou ou Gerasimov, je pense que lui n’est pas affaibli. Il a tjrs 2 fusibles qu’il peut faire sauter.

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  7. Je découvre aujourd’hui l’existence du livre entretien entre ces deux historiens et je viens de le commander. J’ai été interpelé en effet sur le silence qui entourait la chose militaire aussi bien à l’intérieur de ma famille pourtant d’un ancien militaire qu’à l’extérieur. Et je me suis rendu compte de ce silence qu’en écrivant une biographie de mon père après sa disparition (ses enfants étaient surpris de recevoir les lettres de ses camarades de la 2eme DB et des Français Libres leur demandant un résumé de ses activités de guerre et de ses décorations. Après 21 ans d’armée, sa carrière s’achevait en 1962. Mais après le silence des armes c’était à son tour de rester silencieux.
    Stéphane Audoin-Rouzeau parle d’un déni de la part d’ombre de la guerre dans une vidéo de l’éditeur. Elle concerne aussi la société américaine à en croire de Karl Marlantes, un ancien officier et vétéran des marines au Vietnam :

     » Une bonne partie de la société considère que c’est politiquement incorrect de s’intéresser à la chose militaire, ce sujet restant de ce fait un quasi mystère pour la plupart des gens ».

    Le silence sur la question militaire en période de paix interrogeait encore le capitaine de Gaulle en captivité dans ses « Lettres, notes et carnets » écrites en 1917:

    « Tout d’abord, c’est un fait psychologique que les peuples, en temps de paix, n’aiment pas penser à la guerre quand bien même ils en sentent l’approche certaine ; absolument comme les individus prospères n’aiment guère arrêter leur pensée sur les malheurs possibles. »

    La question militaire est donc l’affaire d’une petite minorité (même au Etats-Unis alors que les représentants au Congrès sont impliqués à la différence du Parlement français!).En ce qui me concerne, je suis régulièrement la guerre en Ukraine depuis le début sur LCI (les interventions de certains « spécialistes  » me désolent parfois), dans le Monde et 3 autres blogs dont le vôtre.

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  8. Les occidentaux en ne laissant pas aux ukrainiens la possibilité d’utiliser des armes de longue portée, ne les laissent se défendre qu’en victimes potentielles, sans possibilité de neutraliser leurs attaquant. En quelque sorte ils se rendent plus ou moins complices de l’agresseur Russie. Qu’est-ce qui justifie une telle attitude?

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      1. Oui, comme en Syrie et en 2014 déja en Ukraine. On voit comment ça évite une escalade. Il est clair depuis longtemps que Poutine veut reconstruire sa grande Russie coute que coute, par la force. Après l’Ukraine sera les pays baltes la Finlande etc.. Le peuple russe asservi et désinformé depuis longtemps ne peut que baisser le nez .

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      2. Bonjour,
        La crainte d’une escalade nucléaire, non ? En dehors de cette capacité dissuasive ultime, les forces russes ont-elles encore des capacités pour mener une escalade conventionnelle ? L’absence de leur aviation en Ukraine semble montrer qu’elle serait incapable d’infliger des pertes majeures dans un engagement contre les forces américaines et alliées. Au plan naval, depuis le coulage du Moksva, la vulnérabilité des bâtiments russes semble démontrée. Quant aux capacités terrestres, hormis un considérable réservoir humain, elles sont largement entamées. Cela dit, Poutine peut tenter une provocation conventionnelle pour justifier une riposte nucléaire. Et c’est bien de cela qu’il faut se garder en limitant les opérations en Ukraine, et humainement à la charge des Ukrainiens.

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    1. La Russie de Poutine est déjà bien incapable de relancer son offensive en Ukraine et se retrouve en posture défensive alors même que les Occidentaux (les Etats-Unis en particulier) sont loin d’avoir mis tout leur poids dans la balance. Difficile d’imaginer dans ces conditions qu' »après l’Ukraine, ce sera les pays baltes, la Finlande, etc. ». Cette hypothèse, qui était envisageable avant février 2022, ne l’est plus depuis que les rapports de force réels ont été vérifiés. Quant à savoir pourquoi les Occidentaux accordent leur aide de manière si mesurée, il y a peut-être la crainte de l’escalade (ceci dit, Biden déclarait au printemps 2022 que l’envoi de chars signifierait la guerre ouverte avec la Russie, on voit que de l’eau a coulé sous les ponts). Mais on peut aussi penser que les Occidentaux (et là encore les Etats-Unis au premier chef) tiennent à garder le contrôle sur l’évolution du conflit (et de fait, c’est l’aide militaire qu’ils accordent qui détermine largement ce qui est possible ou non pour l’armée ukrainienne). C’est d’ailleurs ce qui leur a été reproché de manière de moins en moins voilée par les politiques et les militaires ukrainiens ces dernières semaines. Pas sûr que la reconquête de la Crimée ou du Donbass soit si nécessaire aux yeux de Washington, surtout si cela devait plonger la Russie dans un chaos politique difficilement maîtrisable. La situation actuelle est horrible mais qui en paye réellement le prix ? Les civils ukrainiens victimes des exactions russes, les soldats ukrainiens et russes plongés dans une boucherie interminable, indirectement les populations des pays pauvres qui importent une grande partie de leur alimentation… En attendant, la puissance russe est saignée à blanc, la défense européenne est à la remorque des Etats-Unis, tout cela sans exposer la vie d’un seul GI.

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