Rwanda, pourquoi avoir assassiné le président Habyarimana ?

Oui, pourquoi avoir assassiné le président Habyarimana, l’homme lige du « Hutu Power » au Rwanda ?

Parce qu’il ne l’était plus.
Le président Habyarimana montrait qu’il acceptait la solution de paix trouvée sous l’égide de l’OUA et de l’ONU, et qui partageait le pouvoir entre Hutu et Tutsi exilés, dont le retour au Rwanda était la principale revendication. Ces accords, signés le 4 août 1993 à Arusha, en Tanzanie (ce pays jouant le rôle de facilitateur), prévoyaient aussi le départ de toutes les forces étrangères. Mais il n’y en avait en réalité qu’une seule, la France.
Les extrémistes hutu se sont clairement sentis trahis, mais les représentants de la France qui avaient soutenu pendant quatre ans le pouvoir en place contre les « rebelles » du FPR ont-ils pensé qu’ils perdaient le contrôle de ce « petit pays », qu’ils avaient placé bien trop haut dans leur lutte contre l’influence anglo-saxonne et leur capacité à mener une guerre anti insurrectionnelle ?

La préparation de cet attentat n’a pas pu échapper à la DGSE.

Compte tenu de l’attention qui était portée d’une part au Rwanda dans cette période de fortes tensions et d’autre part aux missiles portables anti aériens (qui sont en réalité lourds, encombrants et fragiles) pour éviter une action terroriste, il a fallu aux organisateurs de l’attentat le « parapluie » de services secrets assez puissants pour que l’opération ne soit pas bloquée ou éventée.
Du fait des facteurs techniques exposés précédemment, il était impossible de préparer ce genre d’opération dans la discrétion. La lourdeur des préparatifs (acquisition et acheminement des missiles comme de l’équipe de mercenaires, reconnaissance et préparation du site de tir, planification et conduite de l’opération, protection du commando) n’a pas pu échapper à un service efficace comme la DGSE, qui en a informé les plus hautes autorités de l’Etat français.

Quel rôle la France a joué dans l’assassinat du président Habyarimana ?

A minima la France – tout du moins les quelques décideurs qui se sont sentis un tel pouvoir sans jamais en assumer la responsabilité – a laissé faire, au pire elle a participé et donné son feu vert. Ce qui est sûr aujourd’hui est que l’Etat français avait préparé une intervention imminente sur Kigali.
Didier Tauzin, qui commandait alors le 1er RPIMa, le raconte très bien : il avait mis son régiment en alerte « dans l’heure » pour intervenir et il n’a pas compris que son départ ne soit pas confirmé. Le gouvernement de cohabitation s’est vraisemblablement opposé à la volonté de l’Elysée. Certes le président de la République est constitutionnellement le chef des armées, mais les « clefs du garage » sont au gouvernement, qui peut retarder sans difficulté l’exécution d’une telle opération.


Ce qui est troublant aussi, c’est le suicide de François de Grossouvre le premier jour du génocide, le 7 avril 1994. Lorsqu’il apprend l’assassinat du président Habyarimana, le conseiller Afrique du président de la République ne peut retenir sa colère : « les cons, ils n’auraient tout de même pas fait ça ! ». Il s’est suicidé en début de soirée, en se tirant une balle dans la tête, à l’Elysée.

Alors, quel rôle a joué la France dans l’assassinat du président Habyarimana au Rwanda, premier acte d’un coup d’Etat qui marqua le début du génocide perpétré contre les Tutsi ?
Quels décideurs de l’époque ont pris ces décisions dramatiques ou, pire encore, ont laissé agir un clan de faucons, au nom de la France ?
L’ouverture des archives, qui restent bloquées depuis 25 ans, permettrait de répondre à certaines de ces questions.

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