Gaza : pourquoi Netanyahou fait tout pour empêcher un cessez-le-feu ?

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Prenons quelques instants pour nous extirper de la situation gluante dans laquelle la dissolution kamikaze du président Macron nous a plongés. Les guerres n’ont pas cessé pour autant et le reste du monde continue à respirer, espérer et trembler. La situation en Ukraine est relativement stable même si les combats sont intenses, illustrant l’incapacité de l’armée russe de percer les défenses ukrainiennes. Mais la guerre que mène Benyamin Netanyahou contre la bande Gaza, dans son neuvième mois de larmes et de sang, s’approche de sa fin tragique.

Cependant, depuis le cessez-le-feu de fin novembre, le Premier ministre d’extrême-droite qui dirige le gouvernement d’Israël fait tout pour empêcher les projets de trêve d’aboutir et il s’oppose en particulier depuis fin mai au projet du président américain Joe Biden, bien que celui-ci se soit basé sur les demandes… du cabinet de Netanyahou ! Il est vrai qu’il est particulièrement aidé par son « meilleur ennemi » le Hamas qui souhaite comme lui s’installer dans un état de guerre.

Lire : Débarquement, Ukraine, Gaza, comment ces événements sont reliés

De même début juin, Netanyahou, avec un « sens tactique » évident, a empêché Benny Gantz de tenir sa conférence de presse où il allait expliquer l’impasse dans laquelle le gouvernement actuel enferme Israël. En déclenchant une opération de force en plein jour pour libérer 4 otages, il sacrifiait au passage la négociation de cessez-le-feu qui aurait probablement permis d’en libérer une quarantaine. Et Netanyahou liquidait par la même occasion le « cabinet de guerre » censé représenter l’union nationale. Il continuait ainsi, sans se laisser perturber un instant, son impitoyable offensive contre la bande de Gaza.

Lire : Le Pen, Bardella ou Melenchon : comment les extrémistes trahiront l’Ukraine et nous trahiront aussi


Une pause tactique qui masque une faillite politique

Cependant, dans la nuit du 15 au 16 juin, l’armée israélienne annonçait une « pause tactique » des combats pendant certaines heures de la journée et dans une zone très délimitée proche de Rafah (sud de la bande de Gaza) pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire, bloquée dans la réalité par l’offensive de Tsahal.

Mais à peine quelques heures plus tard, Netanyahou démentait cette annonce en même temps qu’il taclait son armée qui commence à s’effrayer du bilan catastrophique de cette opération.

Tsahal n’a pas eu d’autre choix que d’obéir face à un pouvoir jusqu’au-boutiste qui dicte sa politique, tandis que certains officiers s’inquiètent des accusations de complicité de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité qui les menacent désormais : en empêchant l’aide humanitaire de parvenir dans cette zone sur laquelle l’armée israélienne conduit une offensive dévastatrice (malgré une fois encore les promesses faites aux Américains), ces officiers craignent d’être mis en cause ultérieurement, y compris par Netanyahou lui-même.

Les Etats-Unis dépêchent alors un un envoyé spécial pour relancer cette négociation et empêcher une escalade manifestement recherchée par Netanyahou qui consisterait à déclencher maintenant une guerre contre le Hezbollah dans le Sud du Liban. L’armée israélienne a reçu l’ordre de mettre en scène la préparation de ce qui prolongerait cette guerre permettant à Netanyahou de se maintenir au pouvoir.


L’armée israélienne commence à s’inquiéter

La fuite en avant de Netanyahou se manifeste aussi dans les signes de défiance de l’armée israélienne à l’égard de sa politique. Le porte-parole de Tsahal reconnaît que la « destruction militaire du Hamas » n’est pas un objectif atteignable, pour les raisons souvent décrites sur ce Blog : une « armée fantôme » ne se détruit pas militairement et il est inutile de tenir des promesses mensongères à la société israélienne.

Mais la réaction de Netanyahou est immédiate : remise au pas de son armée tandis qu’il a déjà préparé le terrain pour essayer de faire porter le chapeau aux militaires du désastre du 7 octobre quand le Hamas avait conduit cette attaque inouïe contre Israël (1,400 morts et disparus) alors que ses préparatifs avaient été détectés et signalés au cabinet de Netanyahou, notamment par les militaires israéliens.

Le premier ministre de l’Etat hébreu, qui n’a peur de rien, ose même reprocher à son allié américain (qu’il défie depuis des mois) de lui « livrer avec retard le matériel militaire qu’il aurait acheté » alors même que c’est le contribuable américain qui paie les munitions utilisées pour ravager la bande de Gaza. Comme son ami Donald Trump, Netanyahou ne recule devant aucune outrance.

Notons enfin le glissement sémantique de sa communication où le Hamas – que Netanyahou a outrageusement favorisé avant et pendant cette guerre – est progressivement remplacé par le terme « milices palestiniennes » comme s’il reconnaissait avoir toujours assimilé Palestiniens et Hamas pour justifier le carnage qu’il finit d’achever sur Gaza.


Avec le trend actuel de 300 bombardements par jour, soit 9,000 morts par mois (le calcul de projection se base sur le bomb damage assesment expliqué dans l’article ci-dessous), le bilan de l’offensive Netanyahou se situe désormais entre 70 et 80 mille morts que l’état-civil de Gaza est incapable de suivre puisqu’il ne peut compter que les morts qu’il a enregistrés alors qu’il est totalement déstructuré.

Lire : Offensive contre Gaza, un bilan catastrophique pour Netanyahou, quelles conséquences pour Israël ?


La destruction de la bande de Gaza est bientôt achevée, et ensuite ?

Jusqu’ici l’armée israélienne a eu besoin d’environ 3 mois pour dévaster les infrastructures d’une zone correspondant au tiers de la bande de Gaza. Elle a commencé par la partie Nord en octobre, autour de la ville de Gaza, « nettoyée » en début d’année 2024, puis la partie centre autour de Khan Younes « achevée » début avril. Et enfin l’offensive terrestre contre la partie Sud autour de Rafah a été lancée début mai (bombardements en avril) malgré les promesses de Netanyahou aux Etats-Unis de ne conduire qu’une « opération limitée ».

A ce rythme, l’armée israélienne devrait terminer la globalité de cette opération de dévastation en juillet, août au plus tard, et il sera difficile à Tsahal de continuer une telle campagne de bombardements faute de cibles à détruire. Probablement que Benyamin Netanyahou pourra considérer alors avoir suffisamment détruit la bande de Gaza pour que les Palestiniens s’exilent massivement dès la fin des bombardements, son véritable objectif.

Très clairement, Netanyahou n’a pas l’intention d’arrêter sur Gaza avant d’avoir achevé son « plan », sacrifiant au passage la plupart des otages. Mais pire encore, pour se maintenir au pouvoir, il est tenté désormais d’enclencher une autre guerre. Sans doute est-ce pour cela qu’il fait monter la pression contre le Hezbollah au Liban, pour embrayer sur un nouveau conflit armé, en espérant l’arrivée au pouvoir d’un Donald Trump aux Etats-Unis, qui lui apporterait un soutien inconditionnel quand les Israéliens devraient bien au contraire lui demander des comptes et se désespérer de son bilan catastrophique.
Voilà où les extrémistes nous mènent inexorablement, à la guerre et au chaos.

Donald Trump et Benyamin Netanyahou



Pour approfondir,

Sophie Bessis, historienne : « Le gouvernement israélien a concrètement montré que le sort des otages lui était indifférent » (tribune Le Monde)


Urbicide : « Même si Israël arrête de bombarder Gaza demain, il sera impossible d’y vivre » (par Assiya Hamza sur France 24)

En pleine guerre à Gaza, la France équipe des drones armés israéliens (Ariane Lavrllleux et Mathias Destal pour Disclose)

8 commentaires sur “Gaza : pourquoi Netanyahou fait tout pour empêcher un cessez-le-feu ?

  1. gaza = ce conflit qui dure depuis des decennies ne vas jamais s,arreter puisque chacun de son cote crie vengance. je ne suis pour aucune forme de violence ou de guerre mais je sympathise un peu plus pour les gazaouis qui surtout depuis la fin des annees 40 se sont fait manger leur territoire et c,est ce que veux benyamin. lorsque la bande de gaza aura ete detruite completement,les bulldozers israeliens vont entrer et raser cette terre a nue et s.y etablir les palestiniens n,auront d,autre choix que de partir, s,ils en reste encore de vivant

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  2. Le grand rêve, après la Deuxième guerre mondiale, d’une paix Internationale durable, conforté par la création des Nations unies, est de plus en plus tourné en cauchemar.

    En 2024, nous sommes plus que jamais près d’une ou l’autre des possibilités suivantes, sans réel espoir d’une fin heureuse : la Troisième guerre mondiale ou l’apocalypse nucléaire.

    Et nos dirigeants ne sont pas réveillés face à cette réalité indéniable.

    Après 1945, on se posait ces questions : pourquoi Munich? Pourquoi toutes ces morts et dévastations injustifiées?

    Aujourd’hui, une seule question…

    Sommes-nous si cons que nous ne pouvons pas apprendre ET retenir les leçons de l’Histoire?

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    1. Il semble que, du plus loin de l’Histoire, celle-ci répète les mêmes histoires, les mêmes drames, et que les morts passés, fussent-ils des millions, n’empêchent pas ceux d’aujourd’hui et de demain.

      Si nous n’étions que « cons »… Hélas l’humain est moins bon qu’haineux de son prochain qu’il veut à tout prix dominer et soumettre.

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  3. Fort bien. Mais votre analyse fait porter la responsabilité du refus de plan Biden exclusivement et uniquement à Netanyahou et à ses acolytes d’extrême-droite. À ce que je sache, le Hamas n’a pas accepté ce plan: il a présenté des demandes additionnelles qui peuvent être négociées, selon Anthony Blinken, et d’autres qui sont, toujours selon la même source, « unworkable. » Tiens donc…

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  4. On fera un grand bûcher de tous ces bouchers :

    • Celui de Damas
    • Celui de Moscou
    • Celui de Gaza (Le Hamas)
    • Celui de Jérusalem

    et qu’on ne me prête pas un jugement antisémite car je ne fais qu’incriminer des dirigeants, et non pas les peuples qui souffrent de ces bouchers !

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  5. Les jours passent, les questions demeurent. Continuez à nous informer des faits et gestes des uns et des autres et de proposer votre interprétation pour alimenter notre réflexion et surtout pour que nous n’oublions pas que ce n’est pas parce Gaza, la Cisjordanie et l’Ukraine quittent momentanément les gros titres de nos journaux et des media en général que ces questions sont moins prégnantes et moins redoutables pour notre avenir à tous.

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