Ukraine, deal au-dessus d’un nid de coucou

A tous ceux qui souhaiteraient comprendre la politique de Donald Trump et en particulier son analyse de la guerre russe contre l’Ukraine, une réponse s’impose : Good Luck !

Alors que la pression militaire russe contre l’Ukraine est plus intense que jamais, avec des résultats limités par la résistance remarquable de cette dernière, cette guerre « n’en finit pas ».

A la (énième) surprise générale, Donald Trump déclare le 14 juillet qu’il donne jusqu’à début septembre (50 jours) à Vladimir Poutine pour signer un cessez-le-feu, manifestant ainsi son impatience face à l’enlisement des négociations qu’il croyait positives. Cette déclaration surprenante du président Trump ne garantit en rien d’un prochain revirement sur le sujet, ses volte-faces étant devenues une caractéristique de sa « logique » politique.

Esquisse du front en Ukraine, Le Monde

On se souvient en particulier que Trump avait manifestement dealé avec Poutine sur sa guerre éclair contre l’Iran en accordant à ce dernier une forme de délai pour conquérir ce qui lui manque des 4 régions (oblasts) ukrainiennes annexées par la force à la fédération de Russie. Dans ce contexte, l’équipe de Trump annonçait début juillet une suspension, fort opportune pour les Russes, des livraisons d’armes américaines à l’Ukraine et mettait cette dernière en grande difficulté.

Lire aussi : Ukraine, qu’est-ce que Donald Trump a dealé avec Vladimir Poutine ?

Las, Donald Trump change radicalement de discours et commence à raconter sa frustration vis-à-vis du maître du Kremlin qui « parle très gentiment avec lui », mais qui le soir même fait bombarder les grandes villes ukrainiennes pour tuer et blesser sauvagement. Il faut rappeler que la Russie de Poutine, outre les combats intenses sur les 1 200 km de front, bombarde au quotidien les villes ukrainiennes avec jusqu’à 300 drones et 30 missiles (un missile équivalant en termes de dégâts à 10 drones), soit 600 bombes par jour jetées contre l’Ukraine.

Dans nos capitales de pays « en paix », nous serions bouleversés par une vague d’attentats de 3 bombes, les Ukrainiens eux doivent affronter ces attentats 200 fois par jour, ou plutôt par nuit pour être précis. Cela n’a pas échappé même à Donald Trump, cette contradiction flagrante entre un discours affiché de Vladimir Poutine de vouloir négocier la paix et cette continuation quotidienne de bombardements de civils, sans même une cible militaire.

De plus, Trump est confronté à une opposition interne au parti républicain qui vit très mal sa bienveillance a l’égard de Poutine, considéré par ceux qui ont peu de mémoire comme l’héritier de l’URSS, ennemi séculaire des Etats-Unis. Mais qu’est-ce qui a provoqué un tel retournement de Donald Trump dans cette guerre qu’il estime ne pas être la sienne et dont il refuse toujours de reconnaître que Poutine en porte la responsabilité ?

Le rôle clef de Mark Rutte, ancien Premier ministre des Pays-Bas et aujourd’hui secrétaire général de l’OTAN

Le président français en sera probablement courroucé, mais c’est clairement Mark Rutte qui a changé la donne auprès de Donald Trump. Il l’a flatté au bon moment, par tweet interposé, pour attirer son attention et s’assurer surtout qu’il sera écouté. En tant que secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte ne dispose plus d’aucun pouvoir exécutif, mais sa place politique peut être importante à condition qu’il soit écouté et respecté.

C’est vraisemblablement Mark Rutte qui a dealé avec Donald Trump le fait que les Etats-Unis livrent des armes « à l’OTAN », financées par des pays membres et à destination de l’Ukraine. Dans l’esprit de Trump, cela représente du business pour ses industriels de l’armement, sans que cela ne soit supporté par les contribuables américains, ni ne soit politiquement engageant dans ce conflit auquel il ne veut surtout pas participer.

Lire aussi : Plus de fric, plus d’efforts, mais guère d’Europe dans le discours aux Armées du président Macron

Dans la réalité, l’OTAN peut d’autant moins dealer avec les Etats-Unis que ceux-ci constituent son actionnaire majoritaire. De fait, Mark Rutte a passé un accord de principe avec le président Trump, et il cherche maintenant quels pays acceptent de le financer – l’OTAN n’ayant aucune compétence en la matière –. Les pays scandinaves, l’Allemagne et les Pays-Bas sont déjà d’accord, la France se positionne contre puisque, dans sa logique, il ne faut acheter qu’aux industriels français. Grâce à cette manœuvre diplomatique, l’Ukraine a échappé de peu à une nouvelle tentative d’asphyxie que la Russie attendait avec impatience.


Un « deal avec l’OTAN » qui n’a pourtant aucune compétence en la matière

Outre le fait que de nombreux armements américains n’ont pas d’équivalent européen (et ce n’est rien par rapport au système de renseignement), l’aide américaine apporte aussi une dimension psychologique et politique cruciale à la résistance ukrainienne. Le sentiment de ne pas être abandonnée est structurant pour l’Ukraine, quand bien même ses habitants sont convaincus qu’il leur faut craindre maintenant le prochain retournement de Donald Trump.

La réalité sur le terrain est plus complexe, les Ukrainiens ne manquant pas d’armes mais de bras, les Russes quant à eux n’ont pas les moyens de leurs ambitions, à part continuer à faire souffrir ce peuple qui se croyait frère. La situation militaire est une impasse dont il faut sortir désormais, les Ukrainiens en sont convaincus et imaginent (non sans peine) le prix qu’il leur faudra payer, des concessions territoriales contraintes par la force armée. La Russie de Poutine est nettement moins persuadée de l’intérêt d’un cessez-le-feu, le maître du Kremlin se complaisant dans la guerre, ou plutôt craignant de devoir la quitter et de se confronter à la réalité de cet engagement qui est une catastrophe pour la Russie et son avenir.

Dans ce nouveau contexte, où il exerce enfin une pression (limitée) sur la Russie, Donald Trump a aussi invité le président ukrainien Volodymyr Zelensky à multiplier ses attaques contre le sol russe. Les Américains fournissent les renseignements pour tracer les meilleures routes aux drones ukrainiens et les Allemands affichent leur aide aux Ukrainiens pour améliorer ces armes de portée suffisante pour frapper largement en Russie.

Le Monde

Mais le protagoniste essentiel d’un futur cessez-le-feu reste plus que jamais Donald Trump, dont la duplicité n’a d’équivalent que sa versatilité. Pourquoi avoir accordé 50 jours supplémentaires à Poutine alors que la négociation dure déjà depuis 6 mois ? Pourquoi avoir diminué par 5 le paquet de sanctions financières que proposait le sénateur (républicain) Lindsey Graham ?

Trump restera dans cette affaire un monstre d’incohérence et d’imprévisibilité, et l’ancien Premier ministre néerlandais Mark Rutte un des premiers dirigeants européens à arriver à le canaliser… un peu. En attendant, la guerre russe contre l’Ukraine continue.




Pour approfondir,

L’Europe fut un nain politico-militaire lors du Conseil atlantique ; elle le reste ! par Jean Marsia


Donald Trump prend acte de son échec sur la guerre en Ukraine et promet des armes pour Kiev et des sanctions pour Moscou, par Gilles Paris (Le Monde)


No comment sur la situation à Gaza, ce dessin de Chappatte suffira


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16 commentaires sur “Ukraine, deal au-dessus d’un nid de coucou

  1. Visiblement le choc est intense en Israël, voilà que le porte parole de l’armée Israëlienne nie la famine à Gaza tout en accusant l’ONU d’entraver l’aide humanitaire! Pour soutenir ses inepsies une stratégie pour le moins macabre ; plus de cent journalistes Palestinniens morts à Gaza depuis octobre 2023, couplé au blocage de l’accès à la presse international.

    Pourtant face à l’ampleur de la tragédie, l’informations passe malgrès tout!

    La plus grande défaite d’Israël et bien provoqué par ses propres actes! Face à un gouvernement Israêlien qui s’entête dans le pire souhaitons que le meilleur viennent du peuple d’Israêl… Salutation, Ludovic Melin.

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  2. J’avoue j’attendai votre prochain article pour ce commentaire, mais bon, vous avez préférai vous référé à un préçédent, m’a fois sans doute à raison au vue de la faible évolution de la situation au moyen-orient…

    Pour m’a part un collégue de confession juive m’a redonnée une lueur d’espoir. Semblant ecoeuré par « le grand Israël » tant fantasmée par le premier ministre Israëlien et sont gouvernement. Certe, capter une phrase dans une conversation entre deux collégue ne mets sans doute pas fin à une guerre, mais voilà, je suis d’humeur optimiste!

    Je veux y voir une prise de conscience parmis les Israëliens de plus en plus grande que ce rêve de grandeur que leur vends à toutes les sauces leur gouvernement afin de supporter c’est crime de guerre voir crime contre l’humanité, apparait de plus en plus de manière concrête comme un grand charnier destiné à apaisée la soif de sang de certain, voir une grande cupidité destinée à ceux qui voudrai s’accapparer les terres de leur voisins… Mais de moins en moins comme un retour de la sécurité et de la grandeur d’Israël!

    C’est doute sont d’autant plus fort que la fameuse guerre des douze jour contre l’iran n’a en rien fait évoluer la situation, alors qu’une des prinçipales raisons de son soutient parmie les Israëliens était la promesse de mettre fin à leurs détreses!

    Salutation, Ludovic Melin.

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  3. Au début, Trump avait promis 17 BATTERIES DE PATRIOT à l’Ukraine…Finalement en raclant les fonds de tiroirs, ce sera l’Allemagne qui en fournira 2 et la Norvège un. Un rien fourbe, Trump a précisé que la facture finale sera payée par l’OTAN. Donc ce sera le Danemark, Les Pays Bas, l’Allemagne, la Suède, la Finlande, la Norvège, la Grande Bretagne et le Canada qui paieront. Ni la Pologne, la France et l’Italie ne ce sont joints à ce geste de solidarité. A 1,1 milliard de dollars pièce, la facture s’annonce élevée.

    Pour la Pologne ce sera sans doute une « perte de souveraineté » puisque ce pays a acheté la licence pour produire 48 lanceurs au fabricant Raytheon. Enfin La France et l’Italie possèdent leur système SAMP/T

    Une fois de plus on s’aperçoit que c’est l’Allemagne qui fait le plus gros effort pour l’aide militaire à l’Ukraine ( Elle est 3e donateur avec 17 milliards d’€) et la France, avec les grands discours de Macron, pointe en 9e position avec 4,9 milliards d’€ !

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  4. Un peu facile de taper sur Trump. Nos dirigeants ne sont que des lâches. Le spectacle affligeant lors du sommet du G7 et du sommet de l’OTAN restera un moment digne de la plus grande renonciation. Un Munich bis.

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  5. Ce que vous décrivez comme un revirement de Trump, n’est en fait que l’habillage d’un nouvel atermoiement. Rappelez-vous, face aux protestations croissantes de l’opinion aux États-Unis scandalisée par les bombardements de masse de cités ukrainiennes sans réelles justifications militaires, Trump déclarait menaçant qu’il allait annoncer lundi des choses terribles contre la Russie de Poutine (qui est quand même gentil avec moi). Ce qui en ressort : Vladimir, tu as encore 50 j pour régler l’affaire sinon… Dans 50 jours, Trump nous refera le coup. S’il n’a pas encore coupé les vivres à l’Ukraine pour un motif futile.

    Trump agit en politique (comme en géopolitique) tel un magicien : une déclaration tonitruante pour dissimuler ce qui a précédé, tout particulièrement les échecs ou tromperies manifestes. Qui dans l’opinion publique se souvient du règlement du conflit en 24 h, puis en 30 jours, puis en 100 jours. De même, des accusations contre un Zelenski dictateur, des louanges adressées à Poutine, du reproche d’une guerre déclenchée par l’Ukraine, etc. Avec Trump, l’actualité intérieure états-unienne (la seule qui importe à Trump du fait de l’électorat) passe d’une trumperie / tromperie à une autre, charge à la campagne à venir de marteler les quelques réussites (quitte à les inventer ou amplifier si pas suffisantes).

    Fabrice

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  6. Le jeu intelligent de Mark Rutte, possiblement salvateur pour le digne et courageux peuple ukrainien (sauf n ième retournement de Trump), a en grande partie échappé aux médias, ainsi qu’aux analystes et commentateurs des plateaux TV. Le souci, hélas, est pour l’industrie française de l’armement, mais nous payons le prix de nos atermoiements. Merci pour cet édito éclairant.

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  7. La stratégie de Donald Trump m’a semblé assez bien expliquer par la chaine youtube « eu?reka », du point de vue économique, c’est assez simple : tu t’entoure de conseiller au vision antagoniste, et tu suis l’un ou l’autre en fonction de l’humeur du jour ou des résultats des dé… (video a-t-il un plan ou pas…).

    Pour l’Ukraine on est un peu sur le même schéma, mais on la vue avec l’éviction d’Elon Musk, cette stratégie à ses limites, ainsi avec une position de rigueur budgétaire en contradiction avec « la grande et belle loi » celui-çi à perdu sa place sans guère de ménagement de son ançien ami « Donald Trump »!

    Cette loi n’a pas était sans conséquence sur la situaton actuel de la position de Donald Trump vis vis de l’Ukraine, au delà du deal avec l’OTAN, visant essentiellement à plaire à ça base éléctoral, c’est bien ses deals avec les élus Républicains qui pésent lourd dans la balance, bien que Peter Hegbeth aurait bien voulu les ignoré une fois la loi voté, Donald Trump est bien trop expérimenté en politique pour se mettre à dos les élues des deux chambre!

    Par contre comme le fonctionnement de Donald Trump est plein de façade et de faux-semblant dans le domaine publique, notament vis à vis de l’information dont il exécrent les journalistes, il faut rester prudent et plutôt regarder les fait derrière les annonces!

    Pour le moment ceux-çi sont plutôt favorables à l’Ukraine avec des élues pro-européens et surtout fortement opposée à la Russie. Enn parralléle d’une base pro-russe qui s’éffrite face à un fonctionement qui à favoriser la propagande Russe mais qui les rends assez inconssistant : un rejet quasi religieux de la réalité et la mise en valeur des théories les plus farfellus. Celle-çi propagé et soutenue par des réseaux soçiaux dont l’un posséder par Elon Musk… Salutation, Ludovic Melin.

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  8. D’habitude avec krasnov c’est « dans deux semaines je vais faire un truc extraordinaire, vous allez voir » mais putine lui a dit, « non, j’ai besoin de 50 jours pour mon offensive d’été », alors krasnov dit « ok,va pour 50 jours, je bloque le congrès pendant ce temps et j’enfume la presse et les européens avec des bobards, vas-y putine mets le paquet, et si tout va bien dans 50 jours je pourrai dire, vous voyez, ça sert à rien d’aider l’ukraine, ils vont perdre de toutes façons, c’était foutu pour eux dès le départ, c’est la faute de biden et des gauchistes etc. Et promis je lâche les ukrainiens pour de bon. Mais s’il te plaît sans vouloir t’offenser, je sais que je te dois beaucoup mais quand tu me traites comme ça comme un minable ce n’est pas forcément bon pour nos affaires, ça commence à se voir un peu trop. »

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  9. Cher guillaume Il n y a rien a comprendre avec trump . Un jour c est blanc , un autre noir , un autre bleu , un autre rouge ,……..

    Ce stupide de trump ne sait pas se qu il fait avec l ukraine et gaza . Il a donne 50 jours de plus a poutine pour gagner la guerre , et prendre les 4 regions . Il fait le jeu a 100 % de la russie C est simple . Plus de massacre en ukraine pour la russie . Bravo et bravo . Ce type est un CON un vrai CON . Et pro prusse Il dit toujours que poutine est un type bien !!!!! C est a se demander ce qu il faisait depuis 4 ans trump . Surement jouer au golf avec ces stupides amis , ignorant comme lui en geopolitique . Pendant le covid il faisait le boufon a la tele et disait de ne pas mettre le masque et de mettre de la javel dans un verre d eau. et le boire pour tuer le virus . Et les americains mouraient par milliers . Le pire des presidents des usa et le pire des republicains . Il est la pour faire le mal aux usa et dans le monde . Avec l arret de usaid des millions de gens vont mourrir . Rien a foutre . La seule chose pour lui , c est faire du fric pour lui et sa famille . L argent , l argent , ……. point final Et faire de la politique tele .

    Mes respects guillaume Frederic vuotto

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  10. M. Trump a une politique tout a fait claire – vendre SES armes à qui peut les acheter et M. Zelenski est tout a fait d’accord pour cela avec l’argent que lui fournit largement l’Europe ( UE ) et en particulier la France ..celui qui n’a pas compris cela est un IDIOT …

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  11. Beaucoup de commentateurs l’ont rappelé: Poutine perpétue une vieille tradition russe, agrandir l’Empire coùte que coùte. Ses moyens humains sont illimiés, puisqu’en Russie, la vie humaine n’a aucune valeur. Les moyens techiques sont illimiés puisque confortés par la Chine et la Corée du Nord. Seul un effondrement des cours du gaz et du pétrole pourrait arrêter la guerre; mais les sanctions semblent bien vélléitaires et inéfficaces.

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