Israël-Iran : le dôme de fer, un parapluie troué qui a le mérite d’exister

La guerre lancée par Israël contre l’Iran est rentrée dans sa deuxième semaine. Elle est, du fait de la distance qui sépare les belligérants, limitée à des bombardements et à des actions de forces spéciales. Leur intensité est à rapporter à l’étendue du territoire iranien – trois fois la surface de la France, quatre-vingt fois celle d’Israël – alors que l’Etat hébreu ne peut mener dans la durée qu’une centaine de frappes par jour.

Les dégâts sont évidemment cumulatifs, mais pour atteindre ses objectifs militaires de destruction significative du programme d’armement nucléaire et de la capacité de tirer des missiles contre Israël, à ce rythme cette opération requiert plusieurs semaines .

Une durée de guerre limitée dans le temps, qui se réduirait évidemment si les Etats-Unis participaient à cette opération de bombardements. Mais Donald Trump ne sait manifestement pas ce qu’il va décider sur le sujet, son imprévisibilité constituant un facteur critique d’incertitude et de chaos dans ces relations internationales, dont il se vantait de pouvoir stopper les conflits armés.

L’implication directe des États-Unis accélèrerait cette guerre, mais l’escaladerait aussi

De fait, le gouvernement américain a donné l’ordre à une puissante armada militaire de rejoindre la zone (porte-avions, chasseurs et bombardiers sur les bases de la région, avions ravitailleurs…) afin d’agir si le Président américain prenait cette difficile décision « au cours des deux prochaines semaines » et pas « dans deux semaines » comme annoncé de manière erronée . Trump accélèrerait ainsi cette opération dont l’objectif politique est clairement de faire tomber le régime des mollahs, mais il ferait également rentrer les Etats-Unis directement en guerre, ce qu’il se vantait de refuser jusqu’à présent.

Outre les tensions politiques au sein de son propre électorat, Donald Trump donnerait alors une autre dimension à cette guerre jusqu’ici strictement limitée à Israël et l’Iran, même si l’implication « indirecte » des Etats-Unis est évidente et structurante, en particulier en termes de munitions, de renseignement et de soutien logistique.

Lire aussi : Israël – Iran, Une attaque fulgurante, mais par nature limitée

Dès lors, le conflit monterait en intensité, exposant les bases militaires et les intérêts américains à des représailles dans toute la région. Une région où, somme toute, les soutiens de l’Iran ont beaucoup perdu en capacité d’action (notamment le Hamas, le Hezbollah au Liban, mais aussi en Syrie, en Irak et au Yemen) sans qu’ils aient été neutralisés pour autant. De plus, les attentats deviendraient alors, de nouveau, leur principal mode d’action face aux Etats-Unis qu’ils se garderont bien d’affronter militairement.

Bombardements américains des sites (connus) de fabrication de composants d’armes nucléaires iraniens

Les Etats-Unis, sur l’ordre de Donald Trump, ont bombardé en Iran le 22 juin les sites de fabrication de composants d’armes nucléaires de Fordo, Natanz et Ispahan, probablement avec leurs bombardiers B2 qui embarquaient des bombes de destruction des sites souterrains GBU 57.

Il est peu probable que Donald Trump ait fait dans la finesse ! Ainsi, il aurait fait larguer plusieurs de ces bombes sur chacun de ces sites pour maximiser leur destruction. Toutefois, sans équipes au sol capables d’inspecter ces installations souterraines (et, de facto, de rentrer dedans), il est impossible avec des moyens aériens ou spatiaux de déterminer si lesdites installations sont complètement détruites ou partiellement endommagées, voire préservées. 

Tandis que cette guerre se prolonge, le territoire israélien se retrouve exposé aux tirs de représailles iraniens

D’un côté, les Israéliens cherchent à réduire cette capacité de tir des Iraniens en scrutant les départs de missiles ou de drones, pour s’attaquer aux équipements de lancement avec des frappes aériennes immédiates. Ils bénéficient en particulier du système de surveillance américain qui leur permet de détecter les préparatifs de tir, cependant que la capacité israélienne à frapper rapidement est limitée aussi par la dispersion volontaire de ces lanceurs iraniens.

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De l’autre côté, les Iraniens économisent autant que possible leurs forces, tirant des salves réduites, mais plusieurs fois par jour et par nuit, afin de harceler la population israélienne. Les Iraniens combinent des tirs de missiles et de drones pour « saturer » le dôme de fer et l’éprouver dans la durée, l’obligeant à une activation permanente.

Les Iraniens débordent aussi ce système de protection en visant des cibles très différentes (souvent en périphérie des sites sensibles) pour faire hésiter les centres opérationnels qui engagent ces cibles : faut-il garder la priorité d’interception aux zones limitées des sites les plus sensibles ou accepter d’utiliser des moyens limités (ces missiles d’interception ne sont pas infinis en nombre) face à des missiles ou des drones qui ne visent pas ces premiers ?

Une population déçue par la performance, exceptionnelle mais survendue, du « dôme de fer »

Pour résultat, la population israélienne est évidemment déçue que des missiles ou des drones iraniens puissent commettre des dégâts au quotidien, surtout parce que le gouvernement (en lien avec les industriels concernés) a survendu l’efficacité du « dôme de fer ».

Ce « dôme de fer » est en fait constitué de trois dispositifs superposés qui interceptent par couches successives les missiles menaçant Israël. En réalité, il ne peut pas couvrir la globalité du territoire et reste concentré sur des zones « prioritaires » comme le cœur de Tel-Aviv.

En défense sol-air, l’expérience montre que, même avec des performances très importantes, il n’existe aucun bouclier étanche. Le « dôme de fer » – qui est actuellement complété par un important dispositif d’alerte et d’interception américain – est un « parapluie troué qui a le mérite d’exister ».

En moyenne, une dizaine de vecteurs iraniens frappent Israël chaque jour de guerre

En effet, s’il n’existe pas à travers le monde d’autres dispositifs étendus aussi efficaces, il faut raison garder : le dôme de fer n’a jamais dépassé – dans les meilleures conditions – 90% de taux d’interception. Ce qui veut dire concrètement que lorsque les Iraniens tirent en moyenne 70 missiles par jour, environ 7 (voire, en réalité, plutôt une dizaine) passent au travers du dôme de fer et que des débris des missiles interceptés se rajoutent aux dommages infligés sur le territoire israélien.

Quant aux drones, qui sont relativement faciles à intercepter du fait de leur lenteur, les Iraniens ont bien compris, sur l’exemple de la guerre russe contre l’Ukraine, qu’il fallait les mixer aux attaques par missiles pour déborder les systèmes de défense. Il est difficile en effet d’utiliser des chasseurs ou des hélicoptères armés dans les espaces où le dôme de fer est activé, sans risquer des destructions de ses propres aéronefs.

Au final, si le « dôme de fer » est un élément important de la défense israélienne contre les bombardements, la protection du territoire israélien repose en premier sur le renseignement – essentiellement américain – qui donne l’alerte indispensable pour prévenir les populations visées.

L’absence criante de dispositif de protection pour la population iranienne

Cette protection repose aussi sur l’extraordinaire capacité à pouvoir abriter cette population israélienne. Le bilan presque vingt fois supérieur de victimes civiles iraniennes dans ces bombardements symétriques s’explique notamment par l’absence de protection que le régime des mollahs a consacrée à sa propre population : le système d’alerte de l’Iran est aussi désorganisé que sa capacité à abriter sa population, aucun effort ne lui a été dédié, comme s’il fallait que la population civile iranienne ne puisse pas être épargnée.

Au fond, le régime des mollahs a consacré l’essentiel de son énergie à essayer de détruire Israël, mais il n’a même pas cherché à protéger sa propre population des conséquences d’un conflit qu’il savait pourtant inévitable.




Pour approfondir,

Quelle menace nucléaire et comment s’en protéger ? Chronique dans Le Parisien



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11 commentaires sur “Israël-Iran : le dôme de fer, un parapluie troué qui a le mérite d’exister

  1. Bonjour, j’ai crue comprendre qu’ils execrent la science qui à le touper de dire des trucs qui les contredises, que pour eux la seul éducations qui soit valable est celle qui sert à imposées leur idées, de préférences à soutenir leur mensonges et leur positions xénophobes ou homophobes entre autre!

    Mais il faudrait peut être qu’il cherche un petit budgets pour des magiçiens ou alchimistes, capables de transformer des plans foireux en oeuvre d’art architectural.

    Parsque sinon ça risque fort de mener direct les USA à leur chutes…

    Bon, il y a aussi l’option d’arrêter de dire et faire n’importe quoi. Mais Donald Trump n’a pas du tout l’air d’envisager de prendre cette direction ni les élus qui le soutiennent…

    Quant à son ami Benjamin, il souhaite se faire porter pale à son proçès ; trop occupée à détruire Gaza et à faire la guerre, voir en préparer de nouvelle! Mais les juges ne semble pas tout à fait convaincu par les arguments de ses avocats ni impressionner par les remontrances de Donald… Salutation, Ludovic Melin.

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  2. Même si Benjamin Neytanyou semblait motivé pour transformer l’Iran en Gaza numéro deux, il semble que le teste n’a pas été probant est qu’il ai senti que cela aurait pu être la goute d’eau qui face déborder le vase avec Donald Trump…

    Vue ça versatilité cela n’est peut être que partie remise mais en attendant un cesser le feu fébrile semble s’être instaler.

    Si comme envisager cela finit par la lever des sanctions contre l’Iran on pourra s’interroger sur l’objectif de ses frappes dangereuses sur des sites nucléaires ; tout cela n’aura-t-il été qu’un pretexte pour faire avançer les négoçiations avec la Chine suite à la débacle de la guerre comerçiales et des « tariffs » ou droits de douanes?

    Alors que les USA et Israël vantent le succés d’une guerre ayant selon eux fait disparaitre le nucléaire et les missiles Iraniens, et ouvrant par ce fait en grand la porte de la levée des sanctions contre l’Iran, la suite vera-t-elle un assouplissement des sanctions contre d’autre partenaires économiques de la Chine?

    En attendant souhaitons que par effets domino Israël mette fin à ses multiples guerres, au moins jusqu’à la suivantes… Salutation, Ludovic Melin.

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  3. Israël aurait dépensé environ 250 millions d’euros par jour pour sa défense aérienne face à l’Iran, selon une estimation du média The Marker, rapportée par la revue Le Grand Continent. En une semaine, le coût aurait donc dépassé la barre des 2 milliards d’euros.

    Une guerre avec l’Iran qui durerait un mois coûterait environ 12 milliards de dollars, selon une évaluation de l’institut Aaron de politique économique de l’Université Reichman, citée par le Wall Street Journal.

    Dans sa dernière intervention Poutine dit que l’Iran n’a rien demandé à la Russie. On comprend qu’il n’y a pas d’iaction prévue de la Russie pour aider l’Iran. Au plus une neutralité russe. Et ceci compte tenu de la population russe nombreuse en Israël.

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  4. La France, l’Europe ferait bien d’observer ce conflit. Car je crois savoir que la France ne détient QUE 8 systèmes SAMP/T et qu’elle vient de commander 8 autres systèmes NG, qui ne seront opérationnels …qu’en 2035. C’est à dire dans 10 ans !

    La France est elle à la hauteur des enjeux militaires qui se profilent avec le conflit Russie/Ukraine ? Pour l’instant seule la Pologne a pris le mors aux dents et a commandé pour 10 et 12 milliards de dollars d’armes à la Corée du Sud : 180 chars K2 Black Panther, 200 obusiers K9 Thunder, 48 avions d’attaque légers FA-50 et 218 lance-roquettes K239 Chunmoo…

    En France on patine avec nos 200 Leclerc vieillissant …et on se chamaille avec l’Allemagne sur le char du futur (MGCS) qui verra – peut être le jour en…2040/2045…La joie !

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  5. Bonjour Guillaume,

     

    Je continue de vous lire, chaque semaine, avec toujours autant d'intérêt. Merci.

     

    Ci-joint, quelques petites coquilles (rien de grave).

     

    JdeL  

       

    Sent: Saturday, June 21, 2025 at 6:12 PM

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  6. ainsi donc le president Trump en a decide :le regime des mollahs va-t-il
    tomber ?…je me suis
    techniquement trompe :ce n est le bombardier B1bis qui a effectue le
    raid , mais le pluscher ,le B-2 furtif , sans doute pour eviter
    toute-possible – detection …
    Patrick.-

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  7. Bonjour, Donald Trump à donc franchie le pas, et on peut déjà commençé à s’interroger sur le manque de responsabilité d’un bombardement visiblement massif de site nucléaire Iranien, bien qu’ils semble qu’ils s’agissent de centre de traitement (enrichissement notament) de matériaux nucléaire et non de réacteur, ceux n’est pas vraiment raisonnable… Quand à l’argument non à la bombe en Iran, ils auraient bien plus vite fait d’en acquérir une ou deux via la Chine, le Pakistan ou la Russie ou pourquoi pas la Corée du Nord…

    En attendant les USA sont rentrés offiçiellement en guerre, au vue du mode opératoire il est peut probable que l’Iran est beaucoup de scrupule à des attaques directes contres les USA, et avant même d’éventuel action térroriste ses bases bien plus proche qu’Israël semble des cible de choix ; visant la capaçité d’interçeption précose d’Israël d’une part, l’éffrois de la population Américaine d’autre part…

    Pourtant la fin de la guerre n’est pas actée, tout dépendra de la réaction des soutients de l’Iran d’une part, de ses capaçité à maintenir sa capaçité de combat d’autre part… Pourra-t-elle notament réactivé ses alliés déjà fortement affaiblie par les multiples guerre d’Israël? Les USA pourront-ils alimenté Israël et leur soldats dans la durée? Le coüt de cette guerre que ce soit humain ou finançier sera-il accepter par les citoyens Américain? Beaucoup de question, qui devrait voir leurs réponses dans les semaines et mois à venir… Salutation, Ludovic Melin.

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