Guerre en Ukraine : Poutine annonce une trêve. Rentre-il enfin dans le « jeu » des négociations ?

Je ne sais pas comment nous raconterons plus tard cette période étonnante dans les livres d’histoire… Tandis que Donald Trump, le président américain, nous agite dans son chaos permanent que relaient avec soin ses conseillers si peu coordonnés, la guerre contre l’Ukraine, lancée par la Russie depuis plus de trois années, prend un tournant surprenant.

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Vladimir Poutine annonce samedi 19 avril qu’il ordonne une trêve de 30 heures à effet quasi immédiat pour le week-end de Pâques. Il y met la condition que ce cessez-le-feu soit respecté par les Ukrainiens, ce qui ne fait pas vraiment de doute dans le contexte actuel et met ces derniers dans la situation d’obligés.

Rappelons en effet que cette guerre est dans une impasse militaire. En l’état, les Ukrainiens ne peuvent pas la gagner et chasser l’envahisseur russe (qui se prend pour un libérateur), faute de moyens et surtout de soldats. L’armée russe de Poutine ne peut pas non plus espérer soumettre militairement l’Ukraine avant un siècle : elle avance beaucoup trop lentement et elle n’est jamais arrivée à s’imposer sur le champ de batailles, ce malgré des moyens trois à quatre fois supérieurs en nombre – bien plus qu’en qualité.

Dans ce contexte, la volonté déclarée et la promesse politique de Donald Trump de stopper cette guerre rapidement, font encore craindre les moyens d’y parvenir, mais sans que la finalité ne soit réellement contestée. Trump a d’abord forcé l’Ukraine – via le président Zelensky – à accepter toutes ses conditions, faisant la part belle aux conquêtes de Poutine et, qui plus est, en effaçant les innombrables violations du droit commises par ce dernier (un peu comme Trump d’ailleurs ! ).

Le retour en force des Européens dans le « jeu » de la négociation

En discutant directement et en monopolisant le dialogue avec Poutine, Trump avait mis de côté les Européens comme s’ils n’avaient aucun rôle dans ce conflit. Pourtant, leur soutien combiné à l’Ukraine est supérieur à celui apporté par les Etats-Unis ; le mot « Unis » jouant ici un rôle clef. Mais, après des semaines de manœuvres habiles et en ayant pris soin de ne pas monter sur le ring – où Trump excelle à humilier ceux qui voudraient l’affronter -, les Européens ont enfin réussi à lancer un cycle de discussions avec les conseillers de Trump sur l’avenir de l’Ukraine.

A Paris, le président français Emmanuel Macron a reçu le 17 avril, pour un  » round  » important de négociations avec plusieurs dirigeants européens, le secrétaire d’Etat américain (en charge des affaires étrangères), Marc Rubio et Steve Witkoff, le conseiller et envoyé spécial de Donald Trump, chargés de trouver une issue à ces guerres en Ukraine comme au Proche-Orient. Si la réunion de Paris n’a rien produit de très concret (excepté fixer le prochain rendez-vous à Londres), sa tenue même a lancé une nouvelle dynamique qui permet aux Européens de discuter directement avec les Etats-Unis des conditions de sortie de la guerre en Ukraine, discussions dont ils avaient été exclus par Donald Trump jusqu’à présent.

Préparation active de la mise en œuvre d’un cessez-le-feu prolongé

Français, Allemands et Britanniques, coordonnés avec les nations qui font partie de la « coalition des volontaires » – ceux qui souhaitent continuer à aider l’Ukraine – ont élaboré des scénarii pertinents pour trouver une issue à la guerre de Poutine. Ils proposent – notamment – une force militaire pour garantir un accord de cessez-le-feu (prolongé), si celui-ci était finalement accepté par la Russie ; l’Ukraine n’ayant pas d’autre choix que de l’approuver d’emblée.

Les conseillers de Trump ont été surpris par la détermination des Européens et leur investissement sur le sujet. En effet, pour eux il ne s’agit pas seulement de l’Ukraine, mais aussi d’assurer leur propre sécurité dans l’avenir, face à un dictateur russe qui a fait réitérer par son fidèle ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, sa volonté de mettre la main sur d’autres pays voisins, de la Finlande à la Pologne en passant par les pays baltes…

Entretien de Sergueï Lavrov à la revue Kommersant du 14 avril (ISW)

Les pays européens se mobilisent enfin ! Ils sont d’autant plus crédibles qu’ils sont les premiers concernés par les menaces que fait peser contre eux la Russie de Poutine, et ils ont bien compris que l’Ukraine n’était que le début de leurs problèmes. Ils sont prêts à soutenir politiquement et militairement un cessez-le-feu qu’il faudra transformer en sortie progressive de cette guerre, à défaut d’une paix durable, dont Poutine est probablement incapable.

Impatience de Trump et menaces de sortie du processus de négociation

Tout en continuant à discuter avec Vladimir Poutine, le président américain ne cachait plus son impatience mi-avril, alors qu’il espérait impressionner le monde entier, et tout particulièrement les Américains, en imposant rapidement son calendrier. Les événements et la duplicité de Poutine l’ont quelque peu contrarié…, lui qui s’énerve si volontiers.

Moins d’une semaine avant son annonce, Poutine assumait le massacre de Soumy du 13 avril, lors duquel un tir double de missiles russes a fait un bilan particulièrement lourd : 35 morts et une centaine de blessés civils, en pleine commémoration du dimanche des rameaux. Difficile pour Poutine de nous faire croire qu’il cherche une solution de sortie de crise, en alimentant celle-ci plus que jamais. Les bombardements russes ont augmenté de 50% depuis que le « maître du Kremlin » négocie ouvertement avec Donald Trump…

Chronologie des discussions initiées par Donald Trump © Le Monde

Au sortir de sa réunion avec les Européens, Marco Rubio annonçait, comme une menace, que les Etats-Unis pourraient très bien se retirer du  » jeu « , et Donald Trump déclarait, sans filtres, que si les protagonistes étaient assez « stupides » pour ne pas saisir l’occasion qu’il leur offrait, il passerait à autre chose.

Ce n’était pas une menace contre les Européens et encore moins contre les Ukrainiens, mais bien une forme d’ultimatum à destination de Vladimir Poutine, qui n’a rien concédé en deux mois de négociations, si ce n’est une trêve illusoire sur « les bombardements contre les infrastructures énergétiques », puis en mer Noire. Une trêve qui n’a modifié en rien le cours de la guerre et que personne n’a respectée.

Poutine a probablement approché le point de rupture avec Donald Trump, qui lui concédait pourtant beaucoup, en reconnaissant tout ce qu’il a commis d’illégal, de sa guerre contre l’Ukraine à la déportation des enfants, dans les zones conquises par ses armées, qui se comportent comme des bouchers.

L’annonce de cette trêve temporaire ressemble à une marche importante dans un processus incertain

Par ailleurs, Poutine ne risquerait plus – en acceptant de discuter d’un cessez-le-feu prolongé – de voir la ligne de front se figer en Russie même, puisque son armée, avec l’aide de soldats nord-coréens et surtout de Donald Trump (qui a imposé l’arrêt de l’accès ukrainien au renseignement américain… ), a déjà récupéré ce territoire russe, dont les Ukrainiens s’étaient emparés par surprise dans la région de Koursk.

Lire aussi : Trump promoteur du chaos, Poutine de s’en réjouir et les Européens de réagir

Le respect de cette trêve inattendue de Pâques sera la première marche d’un escalier certes glissant, mais capable d’accéder à la fin des combats menés par la Russie contre l’Ukraine. Cependant, le simple fait d’avoir annoncé un cessez-le-feu temporaire dans ce contexte signifie-il – pour autant – que Poutine est rentré dans la négociation initiée par Donald Trump ? La suite va s’écrire sous nos yeux, avec un rôle clef des Européens qui jouent – eux – l’avenir de l’Ukraine et de leur propre sécurité.




Pour approfondir,

Le parti de Moscou ne désarme pas, par Vincent Laloy (Desk Russie)


Après le bombardement mortel sur Soumy, de très amères négociations de paix entre Russie et Ukraine, par Thomas d’Istria (Le Monde)


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12 commentaires sur “Guerre en Ukraine : Poutine annonce une trêve. Rentre-il enfin dans le « jeu » des négociations ?

  1. On a vu ce qu’a donné le plan de paix concocté par les européens. Minsk II était une arnaque destiné à piéger les Russes. La France et l’Allemagne – Hollande et Merkel – étaient garants du respect de cet accord scélérat que l’Ukraine n’a jamais respecté. On a vu à cette occasion l’insincerite de l’Occident vis a vis de la Russie et du deux poids deux mesures en matière de droit international. Les européens ont perdu toute crédibilité et peuvent aller se rhabiller avec leur plan a la noix… Les Russes ne les prendront jamais plus au sérieux.

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    1. Vous êtes un peu difficile à suivre. Que vous détestiez « l’occident » (c’est-à-dire qui, exactement?) et que vous souhaitiez vivre sous une dictature comme en russie (peut-être est-ce déjà le cas), soit. Chacun ses goûts (en démocratie du moins). Mais venir prétendre que c’est l’ukraine (dénucléarisée) qui était une menace pour la grrrrande russie (nucléaire), que putine, un simple ex-officer du KGB, très mal conseillé, s’est fait arnaquer à Minsk par les méchants Allemands qui lui volaient son gaz et les fourbes Français qui séquestrent ses amis oligarques sur la côte d’azur, qu’envahir et détruire l’Ukraine à coups de bombes et de missiles et enlever les enfants ukrainiens c’est de la légitime défense, et que la crédibilité et l’honnêteté sont du côté du kremlin… Vous êtes difficile à suivre. Ou bien est-ce votre gagne-pain?

      Question crédibilité, nous sommes d’accords: le kremlin ne connaît, ne comprend et ne respecte que la force, et se fiche de tous les plans, accords et traités.

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    2. Là nous me surprenez, je savais que ce traité avais sauté avec l’attaque de 2022 de la Russie et je suposée qu’il y avait à quelque part une volonté de passé en force pour mettre les négoçiation de paix de l’époque en leur faveur, mais je croyez que les Ukrainniens étaient ceux qui avait le plus de grieffe vis à vis de cette accord, qui avait résulté en une annexion de la Crimé, et n’avait pu empêcher l’attaque des Russes et la reprise des combats… Je n’est le point de vue que de quelques individus sur un blogue mais je sens beaucoup de défiance des Ukrainniens, certe par rapport à leur envahisseur mais aussi vis à vis des occidentaux qui leur semblent toujours trop éloigné de leur parole… Comme avec les munitions promisent en 2024 qui sont finalement arriver en 2025 (même si je carricature un peu…) Vue qu’ils sont allier au Ukrainnien je supose qu’il est logique que les Russes soit également méfiant vis à vis d’eux, je doute pourtant que ce point de convergence fasse beaucoup avançé le proçessus de paix… Par contre évaluer la situation du point de vue d’il y a près de dix ans pour statuer sur celle d’aujourd’hui me semble être une erreur. En effet la situation géopolitique à beaucoup évoluer, et les rapports de force ou même d’influence ne sont plus les mêmes, ainsi, par exemple, on note un investissement politique et militaire bien plus important qu’à l’époque, que se soit du coté Russe ou Ukrainnien d’ailleur notament par l’investissement bien supérieur de leur allier, Europe pour les uns , Iran et Corée du Nord notament pour les autres (même en oubliant les extravagances de Donald Trump). Salutation, Ludovic Melin.

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  2. Boujour, la date que vous avez préssentie du 9 mai se rapproche est les négoçiations semble bien avançer pour la Russie, dors et déjà Donald Trump envisage de reconnaitre la Crimée comme Russe, d’içi quinze jour se serra sans doute l’Ukraine, et pour le 9 mai 2026 et 2027 la Pologne et la Roumanie; à moins que les états Baltes… Bref à défaut de savoir négoçier Donald trump sait parfaitement accumuler les propos disons inapproprié, pas sure que les Européens et encore moins les Ukrainniens appréçie la mauvaise blague et que cela accélére les négoçiations ; entre pression et blocage la limite est parfois tenue… Salutation, Ludovic Melin.

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  3. Les négociations sont difficiles à cause de la Crimée.

    La Crimée est russe depuis le traité de Jassy 1792 et ne compte que 15% d’Ukrainiens
    Le rattachement à l’Ukraine par Khrouchtchev en 1954 ne s’est produit que parce que la Russie et l’Ukraine faisaient partie du même ensemble politique l’URSS. Sinon, ce rattachement purement administratif à l’époque n’aurait jamais eu lieu.
    Depuis 1992, l’Ukraine n’a jamais rien fait en faveur de la Crimée. Elle n’a pas respecté son statut d’autonomie pourtant prévu lors de l’indépendance. De plus, l’Ukraine mène depuis des années une politique hostile à la pratique de la langue y compris dans des territoires où on parle russe depuis plusieurs siècles.
    Il est tout à fait logique que la Crimée retourne à la Russie.

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    1. On n’est pas en train de refaire un match de foot ou une course cycliste, si il avait fait la passe si il n’était pas tombé… On parle içi de frontière international reconnue, rien avoir avec la langue, sinom les USA sont Anglais et le Mexique Espagnole ou inversement, les déçision historique non plus, sinon l’Algérie est toujours Française… En remettant en cause les frontière de l’Ukraine Donald Trump remets directement en question le Droit international, est les repercussions seraient considérable, car à partir du moment ou on jéte tout à la poubelle, rien n’empêche l’Alaska de redevenir Russe, la Louisiane Française etc. La liste serait immense, encore plus si on remonte dans le temps… Salutation, Ludovic Melin.

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    2. Bien sûr, bien sûr. Et l’Alsace et la Lorraine devraient retourner à l’Allemagne vu que la France n’a jamais rien fait pour elles et mène une politique hostile à la pratique de la langue allemande.

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  4. Je me permets d’ajouter la traduction de l’article paru dans le Kommersant du 14 avril car il est extrêmement instructif quant à la politique menée par Poutine.

    « Lavrov a également indiqué que la Russie souhaitait s’emparer de territoires dans des pays d’Europe de l’Est, du Caucase du Sud et d’Asie centrale, y compris dans des États membres de l’OTAN.

    M. Lavrov a déclaré qu’il était « dangereux » que des fascistes s’emparent de territoires qui n’ont jamais appartenu à personne d’autre qu’à l’Empire russe et à l’Union soviétique et qu’ils y fassent « des choses dégoûtantes ». La déclaration de Lavrov indique que le Kremlin considère les pays indépendants, autrefois colonisés par l’Union soviétique et l’Empire russe, comme faisant légitimement partie de la Russie d’aujourd’hui.

    La Moldavie et l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie, membres de l’OTAN, faisaient partie de l’Union Soviétique et de l’Empire russe, tandis que la Finlande et une grande partie de la Pologne, membres de l’OTAN, faisaient partie de l’Empire russe.

    Le conseiller présidentiel russe et ancien secrétaire du Conseil de sécurité, Nokolai Patrushev, a récemment attaqué la Finlande en utilisant des récits qui ressemblent à ceux que le Kremlin a utilisés pour justifier son invasion de l’Ukraine, et Poutine et d’autres fonctionnaires russes tentent d’utiliser les efforts de colonisation antérieurs de la Russie pour établir des conditions internationales et justifier une future agression contre les États de l’OTAN ».

    Entretien de Sergueï Lavrov à la revue Kommersant du 14 avril (ISW)

    (Kommersant (Коммерса́нтъ en cyrillique) est un quotidien économique russe fondé en 1909).

    Traduit avec DeepL.com (version gratuite)

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  5. Bonjour, poursuite des attaques sur les axes prioritaires et pause opérationnel sur ceux plus secondaire, ce cessez le feu et loin d’un succés retentissant, mais une petite source de joie, aussi peu fiable que soit ce chiffre, l’annonce par l’état major Ukrainnien de moins de 1000 soldats perdu au 20/04/2025 par l’armées Russes, cela faisait des mois que cela n’était pas arriver (autant que je m’en souvienne), et marque un léger fléchissement de l’offenssive Russe… Les négoçiation s’avérent compliquer, preuve en est de l’entré des européens dans le proçessus bilatéral de négoçiation de Donald Trump, qui n’a pu que constater que sont nom ne suffisait pas à imposer la paix à la Russie. Il est probable que sans revers majeur de celle-çi; qu’elle soit peu incline à réellement entrer dans un procesus de paix convaincu qu’elle a le pouvoir de faire craquer l’Ukraine si elle est suffisament tétu et prête à sacrifier assez de ses soldats…

    La coalition des volotaires pourrait être içi déterminante, la présence d’une force même si elle ne partiçipe pas au combat alors que l’armées Russe ferai fasse à un nouveau revers pourrait présenter un obstacle insurmontable pour la stratégie d’usure de Vladimir Poutine… Mais on n’en est pas encore là, pour le moment La Russie à l’initiative même si elle peine à la conserver, et Vladimir Poutine campe sur ses positions…

    Au passage la négoçiation entre l’Iran et les USA sur le nucléaire Irannien pourrait stabiliser un peu la situation au proche orient, même si, à la base, c’est Donald Trump qui à rompu unilatéralement le préçédent accord et à l’époque jouer avec les cours du pétrole… Pendant ce temps Gaza est toujours privé d’aide humanitaire (sauf si j’ai loupé une info disant le contraire), et sous les bombes… Salutation, Ludovic Melin.

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  6. Trump est imprévisible ,d’un égocentrisme forcené.Poutine veut mettre l’Ukraine à genoux . Maintenir voire renforcer notre aide ,et nous protéger puissamment nous- mêmes,je ne vous pas d’autres solutions.Les sourires complaisants de Georgia Meloni ne suffiront pas pour guérir Trump et Poutine de leur ivresse de pouvoir .

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