
Donald Trump a annoncé le 20 mai 2025 qu’il lançait un gigantesque programme de protection du continent nord-américain, le « fantastique » projet Golden Dome (Dôme doré en français). C’est un immense dispositif sur plusieurs couches aériennes jusque dans l’espace, destiné à détecter et intercepter tout « vecteur » (missiles essentiellement, avions peut-être) qui menacerait le sol américain.
Ce projet devrait être déployé d’ici 2028 (fin du mandat de Donald Trump) pour un montant de 175 milliards $ (à rapporter aux 1 000 milliards $ du budget de la Défense US en 2025), ce qui le rend d’emblée irréaliste compte tenu de l’ampleur de la tâche et surtout de la superficie à protéger, à savoir 10 millions de km2 rien que pour les Etats-Unis et 24 millions pour l’ensemble de l’Amérique du Nord.
Mythe du parapluie étanche
Ce projet n’est pas né de l’imagination (pourtant fertile !) de Donald Trump. Il s’est inspiré de l’initiative de défense stratégique – appelée aussi guerre des étoiles – de Ronald Reagan et du dispositif « dôme de fer » qui protège une large partie d’Israël. Si le programme de Reagan n’a jamais été mis en œuvre, c’est parce qu’il a été jugé jusqu’à présent beaucoup trop coûteux et ce, pour une garantie douteuse.
Le dôme de fer israélien est considéré, quant à lui, comme le plus perfectionné des parapluies de protection antiaériens. Il est constitué en réalité de trois systèmes qui se superposent pour apporter la meilleure capacité de protection. Mais il n’a jamais dépassé 90% d’efficacité pour une surface inférieure à 22 000 km2, surface 450 fois plus petite que celle des Etats-Unis.
Cependant, pour des raisons politiques mais aussi de propagande commerciale, ce dôme de fer a fait naître le mythe dans les esprits qui ont peu de connaissances militaires, qu’un parapluie étanche pouvait protéger un espace défini de toute attaque (aérienne). Un peu comme une ligne Maginot de l’espace, celle qui a fait croire aux Français qu’ils étaient bien à l’abri derrière ce mur de fortifications…
Pour preuve, confronté à une attaque massive de l’Iran en avril 2024 avec plus de 300 vecteurs (missiles et drones), Israël n’a été sauvé en réalité que par l’intervention des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France, alors que le dôme de fer n’aurait probablement pas pu intercepter plus des 2/3 des vecteurs lancés contre lui. Rappelons d’ailleurs que l’Iran avait pris soin d’informer les Etats-Unis avant de frapper, afin d’éviter de commettre des dégâts importants…
Lire aussi : Attaque chorégraphiée par l’Iran
De fait, même pour une surface réduite et en bénéficiant d’une alerte, le dôme de fer n’a jamais constitué un rempart étanche pour Israël, mais une capacité de prévenir et de réduire les attaques menées contre son sol. Dans les meilleures conditions, le dôme de fer atteint 90% de taux d’interception ce qui est notoirement insuffisant face à une attaque nucléaire, et plus encore dans une opération de saturation bénéficiant d’un effet de surprise.
L’idée même de penser être à l’abri de toute menace est un danger en soi : elle peut laisser s’endormir ou, au contraire, inciter à une politique agressive et offensive. C’est cela qui inquiète la Chine qui n’a par ailleurs pas l’intention – pas plus que la Russie, l’Inde ou la Grande-Bretagne – de se lancer dans une course aux armements aussi ruineuse que stérile.
Un dispositif inadapté aux menaces qui pèsent contre les États-Unis
Le Golden Dome ne répond clairement pas aux menaces de sécurité militaire auxquelles sont confrontés les Etats-Unis : une attaque de missiles contre le sol américain exposerait en effet son initiateur à une riposte qui suiciderait l’attaquant en cas d’explosion nucléaire. Et s’il s’agissait d’une attaque terroriste – au moins en apparence commise par une organisation qui ne soit pas un État –, il existe des moyens beaucoup moins sophistiqués et moins coûteux pour acheminer une arme nucléaire sur le sol américain qu’un missile de dernière technologie, en utilisant un container maritime par exemple.
Les Etats-Unis disposent aujourd’hui de l’armée la plus puissante du monde, mais s’ils dispersaient leur effort (financier notamment) sur des systèmes non essentiels, ils passeraient à côté de menaces beaucoup plus sensibles, comme la prolifération des drones (engins autonomes) aériens, maritimes et terrestres qui constituent aujourd’hui un défi technologique et opérationnel considérable. Ces drones menacent en effet l’existence même des engins militaires les plus puissants, du porte-avions au char de combat.

Enfin, le fait de déployer des armes dans l’espace – le Golden Dome repose sur un réseau de satellites de surveillance et de tirs – n’est pas des plus réjouissants, à commencer par les problèmes de satellites qui viendraient s’écraser sur terre en cas de défaillance. Pire encore, ce système présuppose, afin de gagner du temps dans l’interception de missiles dont les trajectoires peuvent être de quelques minutes, que des modules d’intelligence artificielle décident en autonomie « d’engager une cible », c’est-à-dire en langage militaire, de la détruire sans validation par une intelligence humaine.
La moindre confusion – et les expériences de voiture autonome ont montré qu’elles dépassaient largement notre imagination – se transformerait en catastrophe, comme par exemple la destruction d’un avion de ligne, si cette intelligence insuffisamment humaine considérait soudainement qu’un changement de trajectoire ou un incident de vol ressemblait à une menace… Rappelons que le plus puissant missile utilisé contre les États-Unis reste à ce jour un avion Boeing 767 de 200 tonnes dans l’attentat du 11 septembre 2001.
Détournement de l’effort public et affaires en or pour quelques industriels
La couleur dorée dont Donald Trump a affublé ce projet de dôme évoque probablement sa représentation du luxe (de ses hôtels) mais aussi les c… en or qu’espèrent certainement quelques industriels qui portent ce programme. L’estimation à moins de 200 milliards $ du Golden Dome ne représente qu’une faible portion du coût d’un tel projet s’il était mené à bien, plutôt de l’ordre de 1 000 milliards $ d’argent public qui iront enrichir des hommes d’affaires sans scrupules et sans vision politique.
Quant à l’agenda annoncé d’un déploiement pendant le mandat de Donald Trump soit à peine en quatre années, il est à l’image du montant du programme : gravement sous-estimé. Il faudrait probablement entre dix et vingt ans pour déployer un tel système et prendre le risque qu’il se révèle rapidement dépassé compte tenu des évolutions technologiques possibles dans un tel laps de temps. Le Golden Dome a donc tout de la ligne Maginot, ruineux et inadapté.

Elon Musk est évidemment un ardent défenseur de ce détournement de finances publiques vers un projet « en or » pour investir dans de nouvelles innovations technologiques à son profit. En comparaison des enjeux auxquels les Etats-Unis sont confrontés, en particulier le réchauffement climatique, consacrer de tels montants d’argent public à un projet aussi peu utile semble des plus déplacés. Le Golden Dome relève d’une grave confusion entre défense et business, mais est-ce le seul objectif de cette trumperie irréaliste et ruineuse ?
Manœuvre de diversion ?
Annoncé à grand renfort d’effets médiatiques dans un cadre doré aussi clinquant que deplacé, ce projet de dôme d’or fait penser – dans son timing en particulier – à une vilaine manœuvre de diversion, tandis que la capacité de Trump à négocier un accord de cessez-le-feu en Ukraine est mise à mal par la duplicité de son ami Poutine. Le Golden Dome va remplir les poches de quelques industriels dont Elon Musk, détourner l’effort américain des sujets les plus préoccupants et agiter la sphère médiatique jusqu’à l’épuisement. N’est-ce pas la meilleure illustration de la politique de Donald Trump, le Golden President ?

PS 1
La guerre en Ukraine bat son plein et le long entretien téléphonique entre Trump et Poutine est pour l’instant sans effet concret, si ce n’est d’avoir gelé les démarches de sanctions envisagées par les élus américains contre la Russie. Poutine joue la montre et Trump serait-il tenté de se faire oublier sur la guerre en Ukraine qu’il croyait arrêter ?
PS 2
Pour l’opération de dévastation que mène Benyamin Netanyahou contre Gaza, je recommande cette chronique publiée par Le Parisien ce dimanche 25 mai :
Pouvons-nous laisser Netanyahou faire ce que nous n’acceptons pas de Poutine ?
Pour approfondir,
L’Union européenne de défense, une nouvelle ligne Maginot ?
par Jean Marsia (AGEFI Luxembourg)
La nouvelle « guerre des étoiles » de Donald Trump
par Élise Vincent (Le Monde)
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Avec le manque de fiabilité des fusées de Musk, il faudra combien de mandats de Trump pour arriver à poser à nouveau un vaisseau spatial sur la Lune (sans parler de Mars) et pour tenter de déployer un rubbish dome ?
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Trump changeant d’idées comme de chemises, dans quelque temps il oubliera celle-ci et en proposera une autre.
Comme il se fait berner pour « son ami Poutine » avec les propositions de paix en Ukraine, il lui faut revenir sur le devant de la scène avec une autre solution .
Prochainement, certains de ses électeurs se rendront compte de leur erreur en l’ayant réélu en novembre 2024 mais il sera trop tard pour faire machine arrière et de part leur faute, le monde subit les volte face de ce président.
S Cazeneuve
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C’est probablement à l’encontre de la Chine que Trump veut refaire la mystification Reagan, mais est-ce plus réaliste qu’alors, surtout quand il se félicite de leurs avancées tarifaires réciproques qu’il a lui-même envenimées ?
Même à l’échelle d’Israël, le dôme de fer n’assure pas sa sécurité comme on l’a si tragiquement vu en octobre 2023. Seule la paix apporte la paix et l’escalade de discours ne se substitue pas à des accords, même appuyés par une force réaliste et proportionnée.
Même à supposer la faisabilité technique d’un tel système à si brève échéance, combien de temps faudra-t-il à ses adversaires pour l’imiter quand on a vu combien de régimes ont pu s’approprier si vite les techniques nucléaires ou spatiales après Los Alamos et Penemunde ?
La dissuasion nucléaire est certes une garantie pour une paix globale mais tant que tous ses acteurs en sont responsables et ne l’utilisent pas pour appuyer une agression illégale et à condition de respecter une proportionnalité depuis trop longtemps dépassée à Gaza ou Kiev.
Si vis pacem para pacem et non bellum.
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Ceci nous démontre une fois de plus que la « présidence » de Krasnov n’est qu’une émission de « télé-réalité » destinée à flatter son incommensurable ego et sa fortune, exactement comme « the apprentice ». Toutes ces annonces « choc », insensées, outrancières, contradictoires, les embuscades dans le bureau ovale, les menaces d’annexer d’autres pays, etc., ne servent qu’à « faire monter l’audimat », comme on disait quand j’étais petit. Il n’y a pas de plan, pas de substance, même pas d’idéologie. A peine un brouillon de scénario, des acteurs, beaucoup de maquillage, et la recherche effrénée du pouvoir et du profit à court terme. Aussi grotesque et captivant que le catch. Les USA à l’état pur. Arrêtons de nous intéresser à ce que dit Krasnov et ne regardons et commentons que ce que FONT (ou pas) ses porte-flingues. Tout le reste n’est qu’un SHOW.
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Bonus.
Le problème de toute défense statique, c’est qu’elle permet à l’attaquant de trouver les failles. Lorsque le Hamas a lancé son attaque sur Israel en octobre 2023, il avait pris soin d’analyser ses défenses. Lorsque les allemands ont lancé l’opération Fall Gelb, ils étaient conscient de la ligne Maginot.
Vous mentionnez aussi le coût. C’est le coût et la production du pétrole qui a entrainé la défaite de l’Allemagne nazie.
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Y a des fois, on se demande si Trump est pas un espion russe.
Sérieux. Vous avez bien fait de mentionner les drones. La guerre Arménie Azerbaidjan a montré leurs importances. Un missile qui guette en altitude un char, ça coute moins cher qu’un char.
Des IA placés dans des satellites qui décident de qui il faut détruire? Lol. Chat GPT, ça se manipule… Ca fait des « hallucinations ». Je ne sais pas quel modèle d’IA il compte utiliser, mais au mieux on limitera les dégats. Les IA sont pertinentes mais ont leur limites.
Les USA trumpistes sont bien loin des USA de 1944 qui avaient su rationaliser leur effort de guerre. Et beaucoup trop proches de nos généraux de 1939 qui ne « croyaient pas » en la radio.
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Bonjour Guillaume,
Merci pour ta chronique dans Le Parisien.
Je pense que pour Israël, ou tout au moins son gouvernement actuel, la guerre se précise avec l’Iran sur quatre fronts. Dans cette logique meurtrière, elle commence par l’anéantissement de Gaza comme celui de la Cisjordanie et des Houthis au Yémen est de mise.
Les USA qui ne veulent plus envoyer de corps expéditionnaires à l’étranger, l’ont compris, c’est pourquoi ils livrent sans état d’âme des bombes à Israël. Finalement, comme en Europe, ils ont refilés le sale boulot à des alliés qu’ils considèrent comme des profiteurs.
D’ailleurs quand on voit le niveau d’endettement des USA, ça peut avoir une logique dans l’esprit d’un gouvernement pour qui seul compte le business et les équilibres financiers. C’est du cynisme à l’état presque pur.
Amicalement,
Philippe
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Le problème de Trump, c’est qu’il a un petit vélo dans la tête. Un jour il se réveille avec une idée fixe, augmenter les droits de douane concernant l’Europe de 50%. Là il rêve d’un dôme d’Or qui ne correspond à rien, qui va coûter trente six bras…de orang outang.
Les montagnes de thunes qu’il va mobiliser vont affaiblir les autres secteurs de l’armée US : Quelle réponse à apporter aux missiles hypersoniques ? ( La Chine s’était vantée de détruire tous les porte avions américains en 20 mn). Quelle réponse a apporter aux « meutes » de drones ( 200) lancés par un vaisseau mère ? Bref…
Ces sommes pharamineuses vont manquer pour répondre au délitement des infrastructures américaines : un pont sur 13 est en mauvais état. L’ensemble des fuites d’eau sur le réseau remplit chaque jour plusieurs dizaines de piscines olympiques…le mauvais état du réseau ferroviaire fait dérailler des trains tirant des wagons de produits chimiques…
Rien que pour moderniser les ponts, la Société Américaine des ingénieurs civils a prédit qu’il faudrait 2.600 milliards de dollars pour cette tache..
Mais Trump veut son « Golden Globe » et remplir les poches de ses copains multi-milliardaires. Et c’est pas DJ Vance, qui dira le contraire !
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Bonjour, mes maigres connaissances sur le sujets me vienne de la chaine You tube « Le journal de l’espace » qui à consacrer plusieurs video sur les problématiques de « guerre dans l’espace », pour ce que j’en ai compris les laser ça consomme trop d’énergie pour être efficasse depuis l’espace et les projectile ça à légérement tendance à créer des tas de débris très problématique pour l’accés à l’espace… Mais je crains que d’autre sujet ne vole la vedette à cette gabjie dans la recherche constantes de Donald Trump de saturation de l’espace médiatique, ainsi il refait la démonstration de sa total inconsistance et surtout son manque de fiabilité ; annonçant de nouveau droit de douane visant l’Europe pour le mois de mai, s’il s’executer il reviendrait de facto sur c’est propre déclaration d’une péride de négoçiation juqu’au 9 juillet… Nouveau Yo-yo en perspective, pour ne rien arranger un budget promettant 5 000 milliard de dette supplémentaire sur 5 ou dix ans semble en bonne voie pour être adopter, ce qui pourrait bien déclencher une crise de la dette Américainne sans préçédent avec des idées aussi lumineuses Il pourrait même faire oublier ça guerre contre les Universités Américainnes… Salutation, Ludovic Melin.
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